03/03/2003: Etre assesseur : les politiques doivent montrer l’exemple...
C’est par ce titre que l’on peut résumer la proposition de loi déposée le 3 mars 2004 par Jean-Marie Dedecker sénateur VLD.
Alors que le problème du manque d’assesseurs est régulièrement utilisé pour justifier l’utilisation du vote automatisé, voici enfin une solution qui donne un message positif et qui pourrait renforcer la démocratie plutôt que de déresponsabiliser l’électeur.
Une piste à suivre.
DÉVELOPPEMENTS
À chaque nouveau scrutin, quelque 90 000 citoyens-électeurs sont amenés à prêter leur concours à l’organisation des élections législatives et régionales, en tant qu’assesseurs d’un bureau de vote ou de dépouillement.
Pour nombre de Belges, remplir la fonction d’assesseur n’est pas vraiment une de leurs occupations favorites. Nous constatons qu’il devient de plus en plus difficile de motiver les gens et de les mobiliser. L’indemnité de 12,40 euros qui est allouée aux intéressés n’est généralement pas suffisante pour compenser la perte d’un dimanche matin de congé. Les excuses invoquées comme motif d’absence témoignent souvent d’une très grande inventivité. Il y a bien sûr les grands classiques (pas entendu le réveil, pas trouvé de place de parking, pas trouvé le chemin, grossesse avancée, grippe, ...). Mais on observe aussi aujourd’hui l’apparition d’excuses « politiquement correctes » (?), telles que le fait de ne pas vouloir toucher des bulletins de vote qui ont été complétés par des électeurs du Vlaams Blok et des déclarations politiques telles qu’un geste de protestation contre l’absence de scission de l’arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde.
Les absences illégitimes sont sanctionnées. Dans certains cas, on envoie même des médecins légistes contrôler si les personnes prétendument souffrantes le sont effectivement et celles qui sont absentes de leur domicile « sont recherchées et ensuite interrogées », selon la formule utilisée par exemple par le parquet de Malines. Les « resquilleurs » sont passibles d’une amende pouvant aller de 250 à 1 000 euros. Tout le système relève donc d’une démarche pour le moins paternaliste. Des personnes respectables sont en quelque sorte criminalisées, ce qui ne fait que renforcer la réticence du citoyen.
Des affaires de ce type sont également déférées au tribunal correctionnel, ce qui ne paraît pas vraiment indiqué en ces temps d’arriéré judiciaire.
Le fait est que les assesseurs demeurent nécessaires pour garantir la bonne marche des élections.
Les absences illégitimes de certains témoignent d’un manque de sens civique. Il y a là matière à un débat approfondi. Cet état de choses s’explique en grande partie par ce qu’il est convenu d’appeler le fossé séparant le citoyen de la politique, c’est-à-dire par le fait que nombre de nos concitoyens ne se sentent plus concernés par la politique traditionnelle ou qu’ils ne s’y reconnaissent plus. Si l’identification des causes précises du malaise sort du cadre de la présente proposition, le symptôme, au contraire, s’y inscrit d’autant plus.
Car, que ces causes soient acceptables ou non, elles se traduisent dans les faits par l’apparition de problèmes d’organisation qui perturbent le bon déroulement des opérations électorales.
Nous remarquons aussi que la politique des poursuites n’est pas uniforme entre les différents ressorts, ce qui engendre une discrimination de fait. En Région flamande (2003), les citoyens qui ne se sont pas présentés sans excuse valable ont fait l’objet de poursuites à Malines, Gand et Louvain, tandis qu’à Anvers et Bruxelles, ils n’ont pas été inquiétés.
C’est pourquoi à l’approche de nouveaux scrutins (2004, 2006, 2007, 2009, 2011, 2012, 2014, 2015, ...), la présente proposition de loi entend proposer un régime différent.
Elle instaure une distinction entre les électeurs et fixe un ordre de désignation des assesseurs et des suppléants. Exerceront la fonction d’assesseur effectif garanti les personnes qui ont été candidates aux élections législatives, régionales, provinciales et communales précédant l’élection en question, mais qui compte tenu de l’interdiction formulée à l’article 95, § 11 ne sont pas candidates à ladite élection. Cela ne pose donc aucun problème aux candidats qui sont attendus dans les studios de télévision le jour du scrutin.
Le raisonnement qui sous-tend la présente proposition peut se résumer comme suit :
- on donne à la population un signal positif indiquant que les hommes politiques sont les premiers à assurer le bon fonctionnement de la démocratie ;
-* on peut s’attendre, de la part de personnes qui étaient candidates (tout au plus six années auparavant), à ce qu’elles s’intéressent à la politique et se sentent concernées par les résultats et les conséquences des élections ;
* les anciens candidats sont des électeurs au même titre que les autres citoyens jouissant du droit de vote, si bien que sur le plan formel, presque rien ne change ; cependant, le risque d’être assesseur passe, pour cette catégorie d’électeurs, de 2 % à 100 % ;
- le régime proposé n’a guère d’influence sur le fonctionnement des partis le jour de l’élection, étant donné que c’est surtout l’après-midi qu’ils doivent pouvoir compter sur des militants pour servir de témoins par exemple ; la plupart des assesseurs officient le matin ;
* le régime proposé garantit une représentation équitable de toutes les tendances politiques parmi les assesseurs ;
- le fait que les absences illégitimes soient sanctionnées pénalement paraît socialement plus acceptable s’il s’agit de personnes qui ont déjà pris part activement à des élections.
Jean-Marie DEDECKER.