29/08/2003: Requête auprès de la Cour européenne des Droits de l’Homme
Contestation du système de vote automatisé en Belgique
Trois citoyens ont introduit une réclamation auprès des deux assemblées fédérales (Chambre et Sénat). Elle visait à demander l’annulation des élections fédérales de juin 2003 .
Les membres nouvellement élus de ces deux assemblées ont rejeté ces réclamations sans même entendre les réclamants. Sans autre recours, ils s’adressent à la Cour de Strasbourg.
MOCOLE, VERHESEN, STASZEWSKI c/ ETAT BELGE
COUR EUROPENNE DES DROITS DE L’HOMME
EUROPEAN COURT OF HUMAN RIGHTS
Conseil de l’Europe Council of Europe
Strasbourg, France
REQUETE
APPLICATION
présentée en application de l’article 34 de la Convention européenne des Droits de l’Homme,
ainsi que des articles 45 et 47 du Règlement de la Cour
under Article 34 of the European Convention on Human Rights
and Rules 45 and 47 of the Rules of Court
I. LES PARTIES
THE PARTIES
A. LES REQUERANTS
THE APPLICANTS
1. MOCOLE 2. ALEXANDRA
3. Belge 4. Architecte
5. 02.05.1957
6. Avenue Charles Brassine, 40 à 1160 Auderghem
7. Téléfax N° : 00.32.2/675.27.26
1. VERHESEN 2. CLAIRE
3. Belge 4. Retraitée
5. 21.07.1938
6. Avenue des Martinets, 36 à 1160 Auderghem
7. Téléfax N° : 00.32.2/672.38.89
1. STASZEWSKI 2. MICHEL
3. Belge 4. Enseignant
5. 04.11.52
6. Avenue Guillaume Keyen, 9 à 1160 Auderghem
7. Téléfax N° : 00.32.2/660.44.98
LES TROIS REQUERANTS AYANT POUR CONSEIL :
9. Mes Georges-Henri BEAUTHIER et Karin ZIDELMAL
10. Avocats au barreau de Bruxelles
11. Rue Berckmans, 89 B 1060 Bruxelles (Belgique)
12. 00.32.2.538.90.10
Fax N° : 00.32.2.538.68.91
ghbeauthier@brutele..be - zidelmalkarin@tiscali.be
B. LA HAUTE PARTIE CONTRACTANTE
THE HIGH CONTRACTING PARTY
13. L’ETAT BELGE, représenté par Monsieur Le Ministre de l’Intérieur, dont le cabinet est établi à 1000 Bruxelles, 66, Rue Royale.
II. EXPOSE DES FAITS
STATEMENT OF THE FACTS
14.
A) BREF RESUME DU CONTEXTE
+ La loi du 11 avril 1994 a organisé en Belgique un nouveau système de vote dit « automatisé » pour les élections législatives, provinciales et communales et pour le renouvellement des conseils de communauté et de région ainsi que du Parlement européen (pièce 1).
Ce système implique, en vertu des articles 6 à 13 de la loi, les étapes suivantes :
l’électeur reçoit une carte électronique qui est « initialisée » par une machine ;
ensuite, il entre dans un isoloir et introduit cette carte dans un ordinateur et effectue son choix sur différentes images qu’il fait défiler sur un écran à l’aide d’un « crayon optique ». Après validation, il retire la carte électronique ;
cette carte est alors insérée par l’électeur dans « l’urne électronique » qui enregistre son vote.
Habilité à ce faire par l’article 1er de cette loi, le Roi a désigné par arrêté du 30 mars 1998, les cantons électoraux qui sont obligés d’utiliser le système de vote automatisé.
C’est de cette manière que la commune d’Auderghem (Région de Bruxelles-Capitale), dans laquelle résident les requérants, a été désignée, entre autres communes, pour tester ce nouveau système.
+ Il convient de dire qu’à titre expérimental, le vote électronique a été introduit lors des élections législatives et provinciales du 24 novembre 1991 pour la première fois en Belgique sur initiative du gouvernement de l’époque, dans deux cantons. Les motifs invoqués pour justifier l’expérimentation d’un système de vote automatisé étaient les suivants :
1. il devenait de plus en plus difficile de trouver un nombre d’assesseurs suffisant pour assurer le contrôle des opérations dans les bureaux de vote et de dépouillement ;
2. le recours à l’automatisation devait permettre aux pouvoirs publics de réaliser des économies notamment par la suppression des frais liés à l’achat, au stockage et à l’impression des bulletins ainsi que par la diminution du montant des indemnités destinées aux assesseurs ;
3. l’automatisation devait permettre une communication plus rapide des résultats ;
4. l’automatisation devait permettre d’augmenter la fiabilité de ceux-ci.
Ce système qui concernait à l’origine deux cantons, a été étendu, en 1994 à 1.400.000 électeurs et en 1999, à 3.250.000 électeurs, soit 62 cantons sur 208 (201 commune sur 589). Il s’agit du même chiffre en 2003. L’intention du Ministère de l’Intérieur est de généraliser ce système pour 2004.
Depuis les élections de 1999, une expérimentation alternative a été menée : un système de dépouillement des bulletins de vote papier, par lecture optique.
Différents élections ont donc eu lieu depuis sur base de cette nouvelle loi, les dernières étant les élections législatives du 18 mai 2003, objet de la présente requête.
+ Les requérants, Alexandra MOCOLE, Claire VERHESEN et Michel STASZEWSKI, ont été appelés à voter dans la commune d’Auderghem pour les élections du 18 mai 2003. Ils se sont rendus dans leurs bureaux de vote, muni de leur convocation, et ont refusé d’effectuer les opérations de vote à l’aide du matériel informatique mis à leur disposition.
Les requérants y ont déposé une copie du courrier recommandé qu’ils avaient adressé quelques jours auparavant à Madame la Présidente du bureau principal de leur canton, afin de lui faire part de leur intention de ne pas participer à ce système électoral basé sur le « vote automatisé ».
Madame Alexandra MOCOLE, la première requérante, a également adressé une lettre à Monsieur Christian PANIER, président du Collège électoral francophone pour le Sénat (pièce 2) ;
+ Les requérants avaient précédemment, à l’occasion des élections communales du 8 octobre 2000, introduit un recours, auprès du Collège électoral de la Région de Bruxelles-Capitale (pièce 3), et, en degré d’appel, auprès du Conseil d’Etat (en tant que candidats aux élections, conformément aux articles 74 et suivants de la loi électorale communale, pièce 4). Ces recours n’ayant pas permis d’aboutir à un véritable débat sur le caractère démocratique des élections réalisées par le biais du « vote automatisé », les requérants ont introduit une première requête devant la Cour européenne des Droits de l’Homme, en septembre 2001, recours actuellement pendant.
+ A l’occasion des élections législatives du 18 mai 2003, le même système de « vote automatisé » a été appliqué, à quelques différences très marginales près (des modifications étant intervenues depuis dans la loi du 11 avril 1994 ). Le système mis en place ne permet cependant toujours pas de garantir les caractère réellement démocratique des élections.
+ C’est la raison pour laquelle les requérants ont introduit, le 27 mai 2003, deux réclamations, à la Chambre et au Sénat, sur base des articles 231 et 232 du Code électoral, afin de demander à ces deux instances de vérifier le pouvoir des membres élus qui la composaient, et ce sur base de la loi du 11 avril 1994 (pièces 5 et 6).
Ces deux réclamations ont donné lieu à deux rapports, en date du 5 juin 2003 (pièces 7 et 8) et à un courrier, daté du 13 juin 2003, adressé à Madame Alexandra MOCOLE (il n’y aura aucune autre réponse adressée aux requérants !) et rédigé dans les termes suivants :
« En sa séance du 5 juin 2003, le Sénat s’est rallié à l’unanimité aux conclusions de sa commission de Vérification des pouvoirs, tendant au rejet de votre réclamation du 27 mai 2003 que vous avez déposé ensemble avec Mme Claire VERHESEN et M. Michel STASZEWSKI.
Vous trouverez ci-joint, à titre d’information, un exemplaire des Annales de la séance plénière du Sénat du 5 juin dernier » (pièce 9).
B) LA TENUE DES ELECTIONS ET LES RAPPORTS DES EXPERTS
La loi du 18 décembre 1998 a institué un collège d’experts (désignés, sans obligation, par les différents parlements) chargé de remettre un rapport concernant le déroulement des scrutins dans les cantons utilisant un système de vote automatisé ou de dépouillement par lecture optique.
S’agissant de la mission de ce collège d’expert, l’article 4 de la loi du 12 août 2000 a modifié la loi du 11 avril 1994, de manière, notamment, à insérer un nouvel article 5 bis, actuellement rédigé comme suit :
« § 1er. Lors des élections des membres de la Chambre des représentants et du Sénat, du Parlement européen et des conseils de région et de communauté ainsi que des conseils provinciaux et communaux, des conseils de district et de l’aide sociale :
1° la Chambre des représentants, le Sénat et le Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale peuvent désigner chacun deux experts effectifs et deux experts suppléants ;
2° le Conseil régional wallon, le Conseil flamand et le Conseil de la Communauté germanophone peuvent désigner chacun un expert effectif et un expert suppléant.
Ces désignations peuvent être effectuées tant lors du renouvellement complet de chaque assemblée que lors d’une nouvelle élection organisée suite à l’annulation d’un scrutin, ainsi que lors d’une élection suite à une vacance à laquelle il ne peut être pourvu par l’installation d’un suppléant.
Les personnes visées au premier alinéa forment le collège d’experts. Ils désignent en leur sein un président et un secrétaire.
§ 2. Ces experts contrôlent lors des élections, l’utilisation et le bon fonctionnement de l’ensemble des systèmes de vote et de dépouillement automatisés ainsi que les procédures concernant la confection, la distribution et l’utilisation des appareils, des logiciels et des supports d’information électroniques. Les experts reçoivent du Ministre de l’Intérieur le matériel ainsi que l’ensemble des données, renseignements et informations utiles pour exercer un contrôle sur les systèmes de vote et de dépouillement automatisés. Ils peuvent notamment vérifier la fiabilité des logiciels des machines à voter, la transcription exacte des vote émis sur la carte magnétique, la transcription exacte pour l’urne électronique des suffrages exprimés sur le support de mémoire du bureau de vote, l’enregistrement exact du support de mémoire provenant du bureau de vote sur le support de mémoire destiné à la totalisation des votes, la totalisation des suffrages exprimés, la lecture optique des votes exprimés et le système de contrôle du vote automatisé par impression des suffrages émis sur support papier.
Ils effectuent ce contrôle à partir du 40ième jour précédent l’élection, le jour de l’élection et après celle-ci, jusqu’au dépôt du rapport visé au § 3.
§ 3. Au plus tard dans les quinze jours après la clôture des scrutins et en tout état de cause avant la validation des élections pour ce qui concerne la chambre des représentants et le Sénat, les conseils régionaux communautaires et le Parlement européen, les experts remettent un rapport au Ministre de l’Intérieur ainsi qu’aux assemblées législatives fédérales, régionales et communautaires. Au plus tard dix jours après la clôture des scrutins et en tout état de cause avant la validation des élections pour ce qui concerne les conseils provinciaux, communaux, de district et de l’aide sociale, ils remettent un rapport au Ministre de l’Intérieur et aux assemblées législatives fédérales.
Leur rapport peut notamment comprendre des recommandations relatives au matériel et aux logiciels utilisés ».
a) Le rapport du 18 octobre 2000
A l’issue des élections du 8 octobre 2000, un rapport a été déposé, en date du 18 octobre 2000 (pièce 10). Ce rapport étoffé de 69 pages contenait diverses constatations et recommandations qui peuvent être résumées comme suit :
1. Absence de garantie, de fiabilité et de maturité
Les experts ont tenu à rappeler la fiabilité et la maturité du dépouillement électronique, alors même qu’ils concluaient, s’agissant du vote informatisé que « le Collège exprime le souhait que d’ici les prochaines élections, des modifications fondamentales seront introduites afin d’accroître la convivialité, la sécurité, la fiabilité et surtout la possibilité du contrôle démocratique du vote automatisé » (5ième paragraphe, p. 68 du rapport des experts).
2. L’impossible contrôle
En pages 12 et 38 du rapport, les experts ont confirmé que « juste avant les élections, le Ministère de l’intérieur divulguait le code source, mais sans les codes de sécurité (p. 38)... la divulgation du code source incluant les algorithmes de sécurité augmenterait la transparence (p. 12) ».
Cette exigence, évidemment essentielle pour permettre un contrôle et un recomptage, a été reprise par les experts dans leurs recommandations en pages 58, 59 et 60.
Si le contrôle par les citoyens est impossible, celui des experts n’en est pas moins problématique. En effet, ceux-ci ont reconnu qu’avec le temps et les moyens dont ils disposaient, leur marge de manœuvre était limitée mais qu’en outre, comme il en était fait mention dans un rapport précédant concernant les élections du 13 juin 1999 (le Collège de 1999 étant composé à deux exceptions près des mêmes membres que celui de 2000), « Le Collège des experts a pu constater que, bien que le ministère soit formellement propriétaire des systèmes de vote électronique, il est entièrement dépendant des firmes qui ont livré ces systèmes. La connaissance des systèmes critiques ne peut certainement pas passer au secteur privé, ce qui mettrait l’autorité publique hors d’état d’exercer un contrôle adéquat sur des systèmes dont elle est propriétaire et dont la démocratie est tributaire » (p. 58 du rapport du Collège d’experts concernant les élections du 13.6.1999).
3. La possibilité de recomptage
Les experts ont fait valoir dans leur rapport (p. 60) à propos des possibilités de recomptage dont se targuait le Ministre de l’Intérieur « qu’il n’a pas procédé à un tel recomptage vu les contraintes de temps imposées et parce qu’il n’a trouvé dans les codes source des logiciels aucune raison de douter de l’exactitude des résultats. Néanmoins, le Collège est d’avis que plusieurs versions indépendantes du logiciel de totalisation doivent exister, afin d’être mieux à même de pouvoir recompter autrement ».
Les experts ont donc eux-mêmes confirmé qu’ils n’avaient pas procédé au recomptage faute de temps, qu’ils n’avaient aucune raison de douter de l’exactitude des résultats mais que néanmoins, pour être mieux capables de recompter autrement, il fallait plusieurs versions indépendantes du logiciel.
Les experts ont également reconnu que la possibilité de contrôle par l’électeur lui-même sur son propre bulletin était inexistante. « Il peut donc subsister dans le chef de l’électeur la possibilité théorique que la machine utilisée ait conservée en mémoire un vote émis et l’affiche correctement, tout en écrivant autre chose sur la carte magnétique » (p. 59) (carte qui sera introduite dans l’urne informatique comme bulletin de vote)
4. La faute à l’homme
Le lecteur de ce rapport des experts du 18 octobre 2000 ne peut qu’être frappé par le credo de ceux-ci dans l’informatique, rejetant à l’humain, la faute. Si des experts défendent un système, ils sont bien forcés de reconnaître qu’avec ce système et par le fait de ce système, qu’ils disent éminemment perfectible, l’homme commet encore des erreurs.
Il est éloquent à cet égard de lire aux pages 51 et suivantes consacrées au problème de Furnes, où une liste, celle du Vlaams Blok, était manquante pour les élections, que les experts ont estimé devoir conclure (p. 57) que « la non apparition de la liste du Vlaams Blok n’est donc pas à imputer à une erreur de logiciel, mais bien à une erreur humaine et procédurale tant dans le chef du ministère de l’Intérieur, que dans celui du responsable provincial, et aussi dans le chef des présidents de bureaux de districts et de cantons ».
Les experts n’ont pas dit que cette erreur, aperçue après dénonciation par des journalistes, n’eût évidemment pas été commise si les différents maillons de la chaîne, qui se penchaient sur le processus électoral, eussent pu avoir une vision d’ensemble du bulletin qui était fourni aux électeurs.
5. Le devoir de circonspection
En page 65 du rapport des experts, il était précisé qu’ : « étant donné qu’une seule personne est en possession de la clé secrète, toutes les personnes qui reçoivent la clé publique savent que seule cette personne a pu verrouiller les données. En d’autres termes, la signature digitale permet de déterminer l’origine d’un fichier mais aussi de vérifier que son contenu ne peut être modifié par des tiers ».
Ce qui est en jeu pour le Ministère de l’Intérieur, c’est que des tiers ne viennent pas s’introduire dans « son système ». Ce qui est en jeu pour la démocratie et pour chacun des citoyens, c’est que le Ministère de l’intérieur, ou une seule personne, ne puisse s’immiscer d’une quelconque façon, dans son vote.
A entendre les experts, il semble bien que le système tel qu’il a été utilisé lors des élections du 8 octobre 2000 soit problématique et ne permette pas de rencontrer toutes les garanties nécessaires à l’organisation d’une élection. Ils insistent cependant d’avantage sur la nécessité de prendre des mesures pour obtenir la confiance des électeurs que sur celle de prendre des mesures pour renforcer la transparence du système. Ils admettent que ces élections n’ont été qu’un banc d’essais pour tester la performance du système automatisé des votes. Peut-on ainsi se permettre de faire des essais et de jouer de cette manière avec la démocratie ?
b) La situation à l’occasion des élections du 18 mai 2003
1. Le déroulement des élections
Lors des élections du 18 mai 2003, divers incidents ont été constatés qui confirment que les recommandations des experts n’ont pas été prises en compte et que les garanties nécessaires au caractère démocratique des élections n’ont pas été respectées.
+ A titre d’exemple concernant la première requérante : Au bureau de vote n°45 de la commune d’AUDERGHEM, sis rue Willame, il a pu être constaté que :
Le mot de passe qui aurait du être remis dans une enveloppe scellée au président du bureau sur base de l’article 17 de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé avait été trouvé dans une pile de documents A4 non cachetés, avant l’ouverture de ce bureau de vote ;
Contrairement à ce que prévoit l’article 15 de la loi du 11 avril 1994, l’ensemble des listes des candidats de chaque parti présenté pour l’élection n’était pas affiché dans le bureau de vote, ni dans chaque compartiment isoloir ;
Ce bureau de vote, où étaient inscrits plus de 800 électeurs, ne comprenait pas, outre la Présidente et le Secrétaire, un secrétaire adjoint justifiant d’une expérience en informatique ainsi qu’un cinquième assesseur et 5 assesseurs suppléants, contrairement au prescrit de l’article 14, 2° de la loi du 11 avril 1994 ;
Ces faits ont été dûment constatés par le procès-verbal dressé par la Présidente du bureau de vote le jour des opérations électorales, soit le 18 mai 2003 ;
Une copie de ce procès-verbal a été réclamée au greffier chargé au bureau principal d’Ixelles, de les conserver. La demande verbale a du être suivie d’une demande écrite qui n’a pu être exécutée immédiatement au motif que ce greffier principal était en congé à la fin de la semaine qui suivait les élections. Ces faits ne paraissent pas isolés (pièce 11).
Madame Anne BODENSTAB, en sa qualité de juge de Paix de la commune d’Ixelles et de présidente du bureau principal du canton électoral d’Ixelles, a d’ailleurs adressé au président de l’arrondissement électoral de Bruxelles un courrier faisant état des différents incidents rencontrés à l’occasion du déroulement des élections du 18 mai 2003 (pièce 12). Elle y précise que :
« Le déroulement des opérations électorales a été anormalement long et lent, et ce, pour des raisons totalement indépendantes de l’organisation locale.
Vous n’ignorez pas que les électeurs ont subi une attente dans des files immenses, et ce, dans des conditions inacceptables pour des personnes âgées, ou à mobilité réduite, ou pour d’autres, notamment celles accompagnées par des enfants.
Il y a deux raisons à ce dysfonctionnement.
La première réside dans le fait que les instructions informatiques du Ministère des Affaires Intérieures ne correspondaient pas à celles que mon secrétaire avait reçues, avec pour conséquence que les présidents des bureaux de vote ont été inadéquatement formés.
Ensuite, et surtout, la suppression de 25 bureaux de vote a engorgé ceux constitués par nos soins. Le nombre d’électeurs ayant augmenté, les embouteillages étaient inévitables. Cette décision de limiter les bureaux de vote a vraisemblablement été prise par le Ministère de l’Intérieur dans un nouveau souci d’économie.
Je ne peux accepter cette situation qui est imposée aux citoyens qui sont obligés de voter.
En outre, des présidents de bureau et des assesseurs ont été agressés verbalement par des électeurs énervés, ce qui a entraîné un certain découragement parmi les personnes désignées par le Bureau Principal, sous ma présidence [...] ».
Madame le Juge de Paix d’Ixelles a d’ailleurs transmis ce courrier aux bourgmestres des communes de Boitsfort, Auderghem et Ixelles concernés par ces constatations.
Le Collège Bourgmestre et Echevins de la commune d’Auderghem a adressé, pour montrer les vices du système, même si il s’agissait d’arguments de nature différente de ceux des requérants, le courrier suivant au Ministre de l’Intérieur :
« La journée électorale du 18 mai dernier fut, dans plusieurs communes, dont la nôtre, des plus chaotiques, bien qu’il s’agisse de la troisième fois que nous participons au vote électronique.
Après examen, il s’avère que les causes des retards peuvent être nombreuses et variées :
1. La diminution des bureaux de vote :
En 1999, il y a eu, à Bruxelles, quatre élections : Chambre, Sénat, Région, Europe.
Les bureaux de vote étaient au nombre de 29 et le scrutin ouvert jusqu’à 17 heures. A partir de 14 heures, les électeurs étaient clairsemés. Une ouverture si tardive ne se justifiait cependant pas.
Cette année, vos services ont cru bon de diminuer nettement le nombre de bureaux (de vingt-neuf contre vingt et un) et de réduire le temps du scrutin (15 heures contre 17 heures).
Ces décisions ont incontestablement perturbé le bon déroulement des élections.
Nous vous demandons, à l’avenir, d’accroître sensiblement le nombre de bureaux d’autant plus que nous possédons le matériel pour ce faire.
2. La lenteur du programme :
Le système, une fois lancé, a commencé à tourner très lentement, avec des longs temps d’attente entre les différentes étapes.
La possibilité de vérifier son vote a également retardé le scrutin.
Enfin, les personnes âgées ne s’y retrouvaient souvent pas avec la nouvelle dénomination des partis, surtout que nous n’avons pas pu afficher les visus, comme le prévoit la loi sur le vote électronique, ce qui aurait permis à chacun de se familiariser avec l’écran durant la période d’attente.
Ces visus ne nous ont pas été fournis par le Ministère. En 1999, ils nous avaient été faxés le jeudi avant les élections.
3. Les retards dans l’ouverture des bureaux de vote :
Certains présidents sont arrivés au scrutin à l’heure indiquée par les instructions : 7h15 ou 30 (il y a en même un qui est arrivé à 7h55, soit cinq minutes avant l’ouverture légale des bureaux).
Vu le temps nécessaire à la mise en route des machines et à toutes les formalités à exécuter avant l’ouverture d’un bureau, cette heure est beaucoup trop tardive.
La non préparation et la mauvaise organisation de certains présidents, dont plusieurs n’avaient même pas ouvert les instructions qui leur avait été données par le bureau principal, sont aussi une cause de retard dans l’ouverture desdits bureaux.
Ce retard n’a jamais été rattrapé pendant la journée.
4. Enfin lors de l’ouverture du bureau, le système de disquette, de mot de passe (que plusieurs présidents ne trouvaient pas, la carte avec le mot de passe ...) sont des opérations qui pourraient être avantageusement remplacées par une seule disquette reprenant les données du bureau et du président.
Le Ministère devrait modifier son programme d’ouverture des bureaux en le simplifiant sérieusement.
5. Les pannes informatiques :
Celles-ci ont été peu nombreuses à Auderghem. Le matériel ayant été testé la veille et des appareils de remplacement étant prévus dans chaque stand « Info » tenu par du personnel communal capable de procéder au remplacement immédiat.
Nous espérons que ces constatations provoqueront une réflexion générale afin que les élections prévues pour l’année prochaine se déroulent dans de meilleures conditions.
Nous vous demandons d’adapter les conditions de vote afin de créer plus de fluidité. Voter doit être un plaisir et non une contrainte.
Il vous appartient de concourir à cet objectif en nous donnant des instructions plus adéquates. A défaut, lors de la prochaine convocation électorale, nous informerons nos habitants des choix pris et des risques prévisibles d’attente abusive devant les bureaux de vote » (pièce 13).
Les préoccupations des électeurs soumis à ce système du vote automatisé ont également été répercutées par la presse (voir pièces 14 à 19) et certains citoyens ont tenu à témoigner des problèmes engendrés par ce type de vote (pièces 20 et 21).
Ces exemples permettent donc de démontrer que la loi du 11 avril 1994 et ses modifications subséquentes n’ont pas été appliquées correctement.
A l’issue de ces procédures de vote, les requérants ont donc adressé une réclamation à la Chambre des représentants et au Sénat, sur base des articles 231 et 232 du Code électoral afin de demander la vérification des pouvoirs des personnes élues sur base de ce mode de scrutin. Ces réclamations ont été déposées le 27 mai 2003 (pièces 5 et 6).
Les requérants pointaient dans leurs réclamations les violations aux articles 10 et 14 de la Convention européenne, de même que de l’article 3 du Premier Protocole additionnel à la Convention, et de l’article 33 de la Constitution belge.
2. Le rapport du collège des experts
Le 2 juin 2003, les experts désignés pour ce faire ont rendu un nouveau rapport, centré sur les modifications apportées au système de vote automatisé depuis les dernières élections d’octobre 2000, et sur les opérations de dépouillement optique et de « ticketing » (pièce 22).
Il est d’emblée utile de préciser que ce rapport, contrairement à celui réalisé en 2000, ne contient qu’une petite vingtaine de pages et ne revient plus sur les questions qui avaient pourtant fait l’objet de « points d’interrogations » et de recommandations dans le rapport précédent. En outre ce rapport est rédigé par des spécialistes, dans un langage propre aux informaticiens, et ne permet pas à l’ensemble de la population d’avoir un accès satisfaisant à l’information qu’il est censé diffuser.
Certaines modifications apportées par rapport aux élections du 8 octobre 2000 ont donc été examinées :
a. L’ajout d’écrans d’information complémentaires
Les experts semblent faire grand cas d’une innovation qui avait été soufflée à l’occasion du rapport précédent et qui consiste en l’ajout d’écrans d’information complémentaires.
L’un des écrans permet notamment à l’électeur de visualiser le vote qu’il vient d’effectuer (la visualisation existait déjà lors des élections de 2000 mais contrairement à celles de 2003, les électeurs ne se voyaient pas offrir d’emblée cette possibilité de visualisation. Ils devaient avoir seuls l’idée de réintroduire la carte de l’ordinateur. En 2003, cette solution à été immédiatement proposée et l’électeur devait lui même y mettre un terme ce qui a accru le temps de vote et donc les files d’attente). Cette visualisation, si elle peut paraître rassurante, ne permet cependant pas à l’électeur de s’assurer de la conformité de son vote avec ce qui apparaîtra, en définitive, dans l’urne électronique. Les experts n’analysent pas ce dernier point qui est pourtant la clé de voûte du système de « vote automatisé », le reproche constant étant effectivement le manque de transparence et de garanties de contrôle, offertes à l’électeur.
Il semble cependant qu’elle n’ait été utilisée de manière massive, le fait pour l’électeur qui visualise le vote émis de ne pas pouvoir revenir dessus, jouant à cet égard un rôle important.
b. L’expérience dite du « ticketing »
A titre expérimental, dans deux cantons électoraux, après que l’électeur ait exprimé son vote, un ticket est imprimé sur un système d’impression spécifique, ticket reprenant les votes émis pour la Chambre et pour le Sénat. Dans le même temps, le système montre à nouveau le vote exprimé à l’écran. L’électeur contrôle alors le vote repris sur le ticket à travers la vitre d’une loupe. Si le vote est correct, l’électeur le confirme et le ticket tombe dans une urne scellée. S’il marque son désaccord, une alarme se déclenche et le président du bureau intervient. S’il constate la concordance, le président du bureau de vote valide le vote de l’électeur et le ticket tombe dans l’urne.
En réalité, le vote est enregistré sur un code barres (mais l’électeur ne peut pas vérifier que le vote qu’il a émis est bien repris dans ce code barres). Les tickets sont comptés manuellement à titre de contrôle du vote électronique. En cas de divergence entre les résultats manuels et automatisés, les vérifications sont faites sur base des résultats obtenus par la lecture des codes barres.
Dans un canton, face à la discordance entre le dépouillement ticket et le dépouillement automatisé, les responsables ont décidé de valider les résultats « automatisés » alors que la loi prévoyait pourtant l’inverse !
En effet, l’article 9 § 2 de la loi du 11 mars 2003 organisant un système de contrôle du vote automatisé par impression des suffrages émis sur support papier prévoit que :
« Le président du bureau principal de canton vérifie la concordance entre les résultats de la totalisation des votes enregistrés sur les cartes magnétiques et ceux donnés par le dépouillement des documents imprimés reprenant les suffrages émis sur l’écran de vote automatisé.
A défaut de concordance, la priorité sera accordée aux résultats émis sur l’écran de vote automatisé ».
Cette disposition légale n’a donc pas été respectée.
Les experts ne font aucune remarque sur la pertinence de ce système et sur l’incident intervenu.
Ils ne précisent pas ce qui va se passer si la concordance ne peut être constatée par le président du bureau, et ne font pas de remarques sur l’intervention d’un tiers dans une opération de vote qui est par essence secrète. Ils ne mentionnent pas, à l’instar de ce qui vient d’être dit s’agissant de la visualisation du vote sur écran, la possibilité d’une différence entre le vote émis et visualisé tant sur l’écran que sur le ticket, avec le vote qui va réellement être pris en compte par le biais de l’urne électronique. De nouveau l’impasse est faite sur les vraies questions que posent la nécessité de transparence, et, de contrôle des votes.
c. Le dépouillement automatisé des votes par lecture optique
Ce système a été mis en place dans certains cantons électoraux. Les votes s’y déroulent de manière traditionnelle, sur des bulletins en papier, mais qui présentent un format particulier de manière à pouvoir être lus de manière automatisée.
C’est un lecteur optique qui va se charger de l’opération de comptage.
Les experts font, dans leur rapport, un long exposé, bien détaillé, sur la manière dont le vote et les opérations de dépouillement et de comptage vont être réalisés par ce système.
De nouveau, après l’exposé de ce système, aucune remarque n’est faite quant aux garanties qu’il apporte par rapport au vote automatisé ou sur ses avantages par rapport à un dépouillement et un comptage manuels.
Les experts ne font aucune comparaison et ne donnent pas leur avis sur la pertinence de ce système et sur ses qualités et sur les risques qu’il peut engendrer. L’examen de ce système qui a de nombreuses fois été plébiscité en lieu et place du vote automatisé aurait dû faire l’objet d’une attention plus accrue et ne se limitant pas à la simple explication de son fonctionnement.
d. Examen des méthodes de contrôle
Cet examen, qui devrait être une des missions principales du collège d’experts, se résume à une seule page. La constatation majeure est la suivante :
« La méthode de contrôle ne diffère pas essentiellement de celle mise en œuvre lors des élections précédentes ».
Les experts constatent que les logiciels de vote sont conformes aux codes sources divulgués par le Service public fédéral de l’Intérieur. Ils précisent en outre que la machine à voter n’a pas retenu les votes qui ont été émis, qu’elle ne peut donc être une cause de divulgation et que c’est bien la carte magnétique introduite dans l’urne, et elle seule, qui mémorise les votes.
Les experts constatent que lors d’un test, le vote émis sur une carte magnétique à l’aide d’une machine à voter a été vérifié sur une autre machine à voter et était tout à fait identique.
Aucun mot sur ce vote tel qu’il a été repris dans l’urne électronique et tel qu’il a été compté.
Mis à part cette remarque lapidaire, les experts n’ont pas fait état des garanties relatives au contrôle des votes, cause majeure d’inquiétude des requérants, alors même que le rapport précédent prévoyait la nécessité d’instaurer un système dans lequel l’électeur pouvait avoir une confiance accrue par le biais de procédures de contrôle et de transparence.
e. Constatations des experts
Dans un jargon tout à fait incompréhensible au non initié, le collège d’experts analyse le code source servant de base au logiciel informatique utilisé dans le cadre des opérations de vote automatisé. Par le biais d’un raisonnement hermétique à souhait, les experts concluent au fait qu’il est « possible d’assurer que le logiciel ne contient pas de code permettant d’influencer frauduleusement le comptage. Le code source était d’ailleurs disponible avant que ne soient connus les numéros de liste, une fraude au niveau du code n’aurait donc été possible qu’au moyen de noms de listes et/ou de personnes (ce qui est facile à détecter) ».
Les experts ne donnent pas les éléments qui leur permettent de penser qu’aucune fraude n’a pu être commise (il est cependant à noter qu’ils ne font à aucun moment d’affirmation catégorique à ce sujet, laissant ainsi penser que le doute reste toujours possible).
Les experts font alors le détail des incidents qui ont été constatés dans les bureaux de vote soumis au contrôle des experts (soit 34 bureaux de vote sur l’ensemble des bureaux du pays) : machines bloquées, files d’attente, nécessité pour beaucoup d’électeurs de faire appel aux présidents de bureaux, tickets bloqués etc ...
Des vérifications ont également été faites dans un bureau à l’issue du vote. Il s’agissait, en se servant des mêmes éléments que ceux utilisés lors de l’élection, de prendre une carte magnétique, de visualiser le vote émis, de l’introduire dans l’urne électronique, puis de la visualiser à nouveau.
Il a été constaté que le vote émis était identique lors de deux visualisations, après passage dans l’urne électronique.
Cependant, il est utile de noter que la carte magnétique a été visualisée, après passage dans l’urne, sur une machine à voter. Rien n’empêche donc que le vote visualisé ne corresponde en rien à celui qui va se trouvé totaliser par le biais de cette carte magnétique et de l’urne électronique. Rien ne permet non plus de penser que d’autres donnés, non lues par les machines à voter, ne se trouveraient pas sur la carte magnétique fournie à l’électeur.
La dernière partie de l’exposé des constatations est consacrée à « l’incident de Schaerbeek » : au moment des opérations de comptage, il est apparu qu’un candidat d’une liste précise avait obtenu plus de voix de préférence que le nombre total de voix exprimées pour la liste de ce candidat. Une enquête a donc été menée et un recomptage a été effectué à partir des cartes magnétiques : il n’y avait plus d’erreur après ce recomptage. La conclusion des experts est que « l’erreur pouvait probablement être attribuée à une inversion spontanée et aléatoire d’une position binaire dans la mémoire vive du PC ». Il s’agirait d’une erreur provenant du système lui-même ! Si la différence de voix n’avait pas été à ce point élevée, cette erreur aurait-elle été constatée de la même manière ? Quels autres types d’erreurs les machines pourraient-elles alors engendrer et comment aurait-on la possibilité de les déceler ?
Le rapport d’expertise n’aborde pas ces différentes questions et les experts ne se montrent pas plus inquiets des risques que cet « incident » laisse pourtant présager.
Pour clôturer son rapport, le collège estime que les résultats obtenus à l’issue des différentes enquêtes sont satisfaisants et les incidents trop isolés pour que l’on puisse s’en inquiéter. Aucun réflexion n’est donc réalisée sur le système de vote automatisé lui même, et, aucune recommandation n’est faite en vue d’apporter à la population les garanties qu’elle est pourtant en droit d’en attendre.
3. Les réclamations des requérants
A l’issue de la remise de ce rapport, les deux chambres saisies par les requérants, la Chambre des Représentants et le Sénat, chargées de vérifier leurs pouvoirs, ont effectué deux comptes-rendus, en date du 5 juin 2003. Les requérants n’étaient évidemment pas les seuls à avoir introduit une telle réclamation et les assemblées législatives se sont prononcées d’un bloc sur l’ensemble de ces réclamations (examinées dans deux commissions, voir pièces 7 et 8).
Les élus ont eux-mêmes estimé que les procédures mises en place correspondaient au prescrit légal, que les logiciels avaient été contrôlés et leur code source diffusé, que les experts n’ont pas noté de dysfonctionnements et que les différents manquements dénoncés n’avaient eu aucune incidence sur le résultat des élections. Ce faisant, ils ont donc déclaré les réclamations non fondées.
Les requérants n’ont pas eu d’autres possibilités de recours. Ils n’ont même pas été entendus, comme ils l’avaient pourtant demandé.
* * *
III. EXPOSE DE LA OU DES VIOLATION(S) DE LA CONVENTION ET / OU DES PROTOCOLES ALLEGUEE(S), AINSI QUE DES ARGUMENTS A L’APPUI
STATEMENT OF ALLEGED VIOLATION(S) OF THE CONVENTION AND / OR PROTOCOLS AND OF RELEVANT ARGUMENTS
15.
Premier moyen : violation de l’article 3 du Protocole additionnel de la Convention des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales signé à Paris le 20.3.1952 et approuvé par la loi belge du 13.3.1955 (Moniteur Belge du 19.8.1955)
Cette disposition stipule que l’Etat s’engage à organiser des élections libres, au scrutin secret, dans des conditions qui assurent la libre expression de l’opinion du peuple sur le choix du corps législatif.
Il s’agit là d’une disposition essentielle au maintien de toute démocratie.
+ L’électeur qui vote à l’aide d’un système automatisé qui lui est totalement hermétique ne possède plus aucun moyen de contrôle sur son vote. N’ayant pas accès à l’ensemble des données contenues dans la carte magnétique censée révéler son choix, les « conditions qui assurent la libre expression de l’opinion du peuple ... » ne sont plus remplies et les garanties de l’article 3 sont méconnues.
Il est important de relever que certains électeurs, d’un âge plus avancé ou moins rompus au maniement de matériel électronique, ont dû faire appel à une aide extérieure, désignée par la loi (et non une aide qu’ils auraient eu l’occasion de choisir, parent ou autre), celle du président du bureau de vote ou de celui ou celle qu’il désigne, pour procéder aux opérations de vote. La présence d’une tierce personne dans l’isoloir, censée assister à l’opération de vote proprement dite, n’a pas permis de garantir aux électeurs le secret de leur choix.
Le manque de transparence, de contrôle et de garantie de ce système est tel que les conditions de l’article 3 du Protocole additionnel du 20 mars 1952 ont été foulées au pied et qu’il n’est pas possible d’affirmer le caractère réellement démocratique de pareilles élections.
+ Pour exprimer son choix, l’électeur reçoit un bulletin de vote magnétique sous forme d’un objet semblable aux cartes bancaires. Le président du bureau de vote « initialise » sa carte avant de lui la confier, ce qui revient à y inscrire un vote blanc. La carte contient donc des informations que le citoyen ne voit pas. Est-ce la seule information qui s’y inscrit ? L’électeur ne peut en être certain car il ne voit rien. Par contre, dans le cas du bulletin papier, il peut le vérifier sans difficultés.
L’électeur désigne ensuite son ou ses candidats au moyen d’un crayon optique et son choix s’affiche sur un écran. Lorsque il « valide » son choix, il n’est pas certain que celui-ci s’inscrit sur la carte magnétique. S’il demande à visualiser son vote, l’électeur ne verra que ce qu’il a effectivement coché sans savoir s’il y a autre chose sur sa carte.
L’électeur reprend alors sa carte et l’introduit dans une urne électronique. Cette machine dispose d’un logiciel censé lire son bulletin de vote. L’électeur n’est pas en mesure de vérifier que ce passage dans l’urne électronique ne va pas modifier son vote.
Avec le vote électronique, il n’y a plus de dépouillement. Ce sont des machines qui décodent les disquettes provenant des urnes électroniques. Tout cela dans la plus parfaite opacité : personne ne voit rien, les machines opèrent ... Dans le cas du vote papier, les bulletins sont comptés, triés et dépouillés, par des citoyens sous la surveillance d’autres citoyens. Et il est fréquent que des « recomptages » doivent être effectués.
Le législateur a confié la tâche essentielle de vérifier le bon fonctionnement des élections aux présidents des bureaux de vote, aux assesseurs et aux témoins des partis. Depuis l’introduction du vote électronique, aucune de ces personnes n’est en mesure d’affirmer que tout s’est déroulé correctement, car ce sont les machines qui opèrent. Si une machine tombe en panne, le président du bureau de vote fait appel à un technicien d’une firme privée désignée à cet effet. Qui peut affirmer qu’aucun vote ou décompte n’est modifié - même sans intention - lors de cette intervention ?
+ Il est également intéressant de rappeler que sur un bulletin « papier », les listes sont disposées les unes à côté des autres dans un ordre déterminé par le hasard. Tous les candidats sont « visibles » sur un support dépliable. Or, avec la machine, l’électeur doit d’abord choisir la liste qu’il veut voir apparaître. Il avait été expliqué que des raisons techniques empêchaient que l’ensemble des listes apparaisse et que l’électeur serait « privé de la vue panoramique qui lui permettrait de comparer les listes et les candidats, sauf évidemment à recommencer l’opération de vote à plusieurs reprises, mais sans être assuré de garder le souvenir des listes qu’il a auparavant consultées » (Voir Projet de loi, Doc. Parl. Sénat, 1993-1994, n°994/1, pp. 39-40).
Le Conseil d’Etat avait souligné le cas de l’électeur qui souhaite voter pour un candidat mais qui ignore le parti dont il se réclame, et, également la situation de l’électeur qui n’a pas encore fait son choix avant d’entrer dans l’isoloir ou de celui qui n’est pas au courant des transferts et des cartels. A cela, il avait été répondu - dans un premier temps - qu’il a été prévu que « l’ensemble des listes de candidats présentés pour chacune des élections sont affichées », ce qui en l’occurrence n’a pas été le cas, comme le confirme l’administration communale d’Auderghem qui, à l’instar d’autres communes, n’a pas reçu les affiches annoncées. Dans certaines communes si des affiches ont été apposées, le plus souvent les isoloirs n’en ont pas été doté.
Dans un deuxième temps, le Ministre a précisé, en juillet 2000, que « la prochaine génération d’écrans permettra de présenter un bulletin de vote complet (Projet de loi, Doc. Parl. Sénat, 1999-2000, n° 599/3, p. 10), ce qui n’a été le cas dans aucun des bureaux de vote. Il n’avait pas été possible que l’écran contienne un bulletin de vote complet !
Une fois de plus, les garanties promises n’ont pas été rencontrées et le droit de voter et d’être élu au cours des élections du 18 mai 2003, assurant l’expression libre de la volonté des électeurs, sans contrainte, a été violé.
Pourtant, la Commission européenne des Droits de l’Homme avait déjà précisé que « les élections ne sauraient comporter une quelconque pression sur le choix d’un ou plusieurs candidats. Dans ce choix, l’électeur ne doit pas être indûment incité à voter pour un parti ou un autre » (Comm. Eur. Dr. H., 8 octobre 1976, X / Royaume-Uni, Rec. 1740/75).
1. Le rôle des « experts »
Les requérants, qui utilisent les progrès indéniables de l’informatique qui s’accroissent chaque jour, ne considèrent pas qu’un progrès qui permettrait une avancée positive pour la démocratie, résiderait dans une confiance aveugle et un abandon au « tout informatique ».
En corollaire de cette pétition de principe, se trouverait l’obligation de faire confiance aux experts.
Un expert n’est pas, par essence, une personne de confiance. Un expert est uniquement une personne choisie pour ses connaissances techniques, chargée de faire des examens, des constatations, des évaluations à propos d’un sujet précis. A partir du moment où un expert devient détenteur d’un pouvoir de décision en matière électorale, le rôle du citoyen et celui de ceux qui sont chargés d’accompagner le processus pour lui garantir un caractère honnête et secret, est faussé. Les conclusions des élus à la Chambre et au Sénat sont à cet égard éloquentes :
« Considérant que les manquements dénoncés ne peuvent, de par leur nature, avoir eu aucune incidence sur le résultat des élections » (Compte rendu analytique, séance plénière de la Chambre des représentants du 5 juin 2003, p. 12, pièce 8).
En outre, ces experts ne sont pas totalement « neutres » : ils sont désignés par les assemblées elles mêmes, parmi leurs propres fonctionnaires. Sans remettre en cause leur impartialité, ce mode de désignation peut fausser la mission qui leur est confiée.
On ne peut pas reprocher à des experts de croire à la performance de leur discipline, mais on peut être étonné qu’un Collège d’experts ne regroupe que des informaticiens ,et encore dans un domaine bien pointu, puisque ceux-ci en viennent eux-mêmes à proposer au Ministère de l’intérieur de se faire assister "par des spécialistes du domaine" (p. 49), recommandant d’ailleurs - ce qui n’est donc pas le cas - que le Ministère ait un contrôle sur les sociétés privées qui produisent et vendent l’appareillage informatique auprès desquelles il se livre pieds et poings liés.
Ces mêmes experts, pourtant spécialistes, n’ont pas eux non plus toute marge de manoeuvre, puisque tout le matériel et sa mise à jour, dépendent du secteur privé, alors qu’eux-mêmes sont des fonctionnaires. Les experts, fonctionnaires des différentes assemblées, - dont des magistrats, des universitaires, entre autres, ont déjà fait valoir qu’ils ne pouvaient prétendre à l’indépendance -, confirment d’ailleurs que le Ministère de l’intérieur et ses propres informaticiens, et, par voie de conséquence, eux aussi ne peuvent entièrement maîtriser le processus informatique :
« Le Collège des experts a pu constater que, bien que le Ministère soit formellement propriétaire des systèmes de vote électronique, il est entièrement dépendant des firmes qui ont livré ces systèmes. La connaissance des systèmes critiques ne peut certainement pas être abandonnée au secteur privé, ce qui mettrait l’autorité publique hors d’état d’exercer un contrôle adéquat sur des systèmes dont elle est propriétaire et dont la démocratie est tributaire » (p. 50 du rapport du 8 octobre 2000, pièce 10).
Ces experts sont donc, en leur qualité de fonctionnaires, dépendants des différentes assemblées, même si leur degré d’indépendance intellectuelle n’est pas mis en cause. Ils sont là - et ils le disent - aussi pour "rassurer" le citoyen qui, par des améliorations, devrait pouvoir faire confiance au système informatique (voir p. 48 du rapport du 8 octobre 2000, pièce 10) :
« .. la confiance de l’utilisateur serait accrue si la visualisation avait lieu sur une machine différente et donc indépendante dans le bureau de vote.. »
Les recommandations de la page 37 à la page 55 regorgent de conseils pour mieux faire « passer » auprès de l’électorat le système du vote électronique :
« Pour cette raison, des mesures visant à accroître la transparence des opérations doivent être prises afin de favoriser la confiance de l’électeur... ».
Finalement, la volonté des experts, du Ministre de l’intérieur et des autres parties favorables au vote automatisé, est de mettre l’accent sur la nécessité d’accroître la confiance des électeurs plutôt que sur celle de mettre à leur disposition un système qui peut être contrôlé par eux-mêmes, communs des mortels, dont la seule compétence serait de savoir lire et écrire.
Quel tribunal, quelle cour, accepterait un rapport d’expertise qui - comme en page 48 -demande une espèce de blanc-seing - sans autre explication - estimant qu’il n’a pas à recompter parce qu’il n’a trouvé dans les codes source des logiciels "aucune raison de douter de l’exactitude des résultats" ?
Les parties réclamantes croient qu’un informaticien, en l’état, commet une erreur lorsqu’il se hasarde à dire, ex abrupto, qu’il possède des garanties sur la fiabilité d’un système ou d’une machine permettant de ne pas douter de l’exactitude des résultats : combien de milliards ne sont-ils pas investis chaque année pour justement maîtriser les erreurs, les questionnements, les pannes du système informatique, surtout lorsqu’ils sont aussi complexes que ceux relatifs aux élections ?
Il y a lieu de noter que les experts estiment tenir un échantillon représentatif des contrôles qu’ils ont pu effectuer pendant les opérations de vote, alors que sur plusieurs milliers de bureaux de vote, ils en ont vérifié 34. Sans doute, faute de moyens, mais aussi de préparation, leur expertise est également limitée.
Les experts reconnaissent dans leurs conclusions que « Le rôle des présidents, assesseurs et témoins, demeure une garantie indispensable du bon déroulement correct des élections » (p. 55 § 3 du rapport du 8 octobre 2000, pièce 10). Ceci renvoie à la nécessaire professionnalisation de ces personnes si elles ne veulent pas être de simples potiches. Or, le contrôle professionnel ne peut être apparenté au contrôle démocratique qui lui est inexistant s’agissant de ce vote automatisé.
Tant les réponses des experts, que celles de la partie adverse, démontrent à suffisance qu’il est erroné d’utiliser des élections comme bancs d’essai pour améliorer un système informatique ou électronique.
2. L’absence de garanties
Aux termes de l’article 33 de la Constitution belge, « Tous les pouvoirs émanent de la Nation. Ils sont exercés de la manière établie par la Constitution » et en vertu de l’article 48 de la Constitution, c’est à chaque Chambre de vérifier les pouvoirs de ses membres et de juger les contestations qui s’élèvent à ce sujet.
En l’espèce, les modalités d’application du système de vote dit « automatisé », comme cela a été exposé ci-dessus, ne permettent pas de garantir aux citoyens qu’il a réellement été tenu compte de l’opinion qu’ils ont souhaité émettre, pour faire choix du corps législatif.
Comme le démontre d’ailleurs le rapport des experts relatif aux élections du 8 octobre 2000, des doutes peuvent être émis quant à la transparence du système de vote automatisé et à l’effectivité des moyens de contrôle qui sont désormais à la disposition des électeurs.
Compte tenu de l’importance de la transparence et du contrôle dans l’exercice d’une activité aussi délicate et aussi essentielle que celle du choix des représentants de la Nation, l’absence de garanties permet de penser que les citoyens sont dépossédés de leur pouvoir premier.
Dès lors, le système mis en place par la loi du 11 avril 1994 ne permet plus d’assurer à la Nation qu’elle est bien à l’origine des pouvoirs qui sont exercés dans l’Etat belge. Les électeurs, du fait précisément de ce manque de transparence et de contrôle, ne peuvent plus être à même de vérifier que le pouvoir législatif est exercé par des personnes qui représentent réellement le corps électoral.
Le système du vote automatisé a donc pour conséquence de porter atteinte au fondement de la démocratie tel qu’il est contenu dans l’article 33 de la Constitution belge.
Les parties requérantes pourraient difficilement accepter qu’il leur soit, comme ce fut le cas antérieurement, reproché de n’avoir pas apporté des preuves concrètes d’irrégularités ayant affecté le bon déroulement des élections alors même qu’elles ont tenu d’emblée, dans un laps de temps extrêmement court, à montrer que des irrégularités avaient entaché ce processus électoral et que des retards importants dus au système informatisé avaient empêché bon nombre d’électeurs de s’exprimer.
En effet, les pièces jointes en annexes à titre indicatif à leurs deux réclamations, font état d’incidents rencontrés par des électeurs pourtant soucieux de participer au choix du corps législatif.
Or la réalisation de l’objectif démocratique contenu dans l’article 33 de la Constitution passe par la nécessaire liberté de vote dont doit pouvoir profiter chaque électeur. Cette liberté « implique que, dans l’isoloir, l’électeur soit mis dans une disposition d’esprit telle qu’il puisse, en pleine conscience, déterminer son choix politique en pleine indépendance. La préservation de cette liberté nécessite que soit évitée toute manœuvre de pression destinée à influencer l’électeur » (M. VERDUSSEN, « Le droit des élections communales », Bruxelles, Némésis, 1988, p. 109).
Il est évident que l’utilisation d’un outil inadapté à l’expérience de certains électeurs, l’absence de listes papier reprenant l’ensemble des candidats, les files d’attente et le stress qu’elles ont engendré, de même que la défaillance du matériel électronique, n’ont pas permis de créer, à l’égard de bon nombre d’électeurs, des conditions adéquates pour procéder à l’opération de vote.
Certaines personnes plus âgées ou moins valides ont du se faire aider par des tiers, ce qui n’a pas permis de garantir dans leur chef le respect du principe essentiel du secret du vote.
Soumis à de telles conditions, il n’est pas possible de garantir la bonne tenue des élections.
Dans la mesure où la transparence, la tenue et le contrôle de ces élections peuvent être mis en cause, il y a lieu de constater que l’article 3 du Premier protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l’Homme n’a pas pu être respecté à l’occasion des élections de ce 18 mai 2003.
Le seul fait que des citoyens ont, depuis 1994, multiplié les recours à l’encontre du système de vote automatisé démontre déjà à suffisance le manque de confiance d’une partie de la population. Ce manque de confiance des citoyens s’agissant de l’opération la plus essentielle de la démocratie suffit à lui seul à porter atteinte à leur droit de vote et à leur droit d’être à l’origine des pouvoirs de l’Etat.
Les autorités belges n’ont, en outre, pas répondu aux interpellations de ces mêmes citoyens qui ont demandé pourquoi la Belgique voulait absolument être précurseur dans ce domaine alors même que d’autres états démocratiques étaient réservés sur ce processus (voir par exemple le cas de la Suisse).
Deuxième moyen : Violation de l’article 10 de la Convention européenne des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales
1. L’ingérence
Cette disposition consacre la liberté d’expression. Par quel autre moyen celle-ci peut elle pleinement s’accomplir si ce n’est par le biais de la participation de la population à des élections honnêtes et libres ? Le système démocratique repose entièrement sur l’idée que chacun a le droit d’exprimer ses opinions et par la même doit avoir la possibilité, le droit, de choisir un représentant qui tiendra compte desdites opinions. A travers le processus électoral, c’est donc incontestablement la liberté d’expression qui est en jeu.
Lorsque les requérants ont mis en doute la fiabilité d’un système électoral basé sur le vote automatisé, c’est leur liberté d’expression qu’ils ont voulu protéger. A partir du moment où les électeurs ne sont plus à même de vérifier que leur vote a bien été respecté, à partir du moment où des fraudes peuvent être commises sans que les citoyens n’en sachent rien, que les machines peuvent générer spontanément des erreurs à la suite, par exemple, d’une inversion spontanée et aléatoire d’une position binaire ( !) que le seul droit de regard qui existe encore sur le déroulement du scrutin appartient aux seuls « experts », comment garantir l’existence de la liberté d’expression ? De plus, il est également important de noter le risque élevé d’erreurs de vote que ce système peut entraîner. Il est inutile de rappeler que pour une partie non négligeable de la population, l’informatique reste un grand mystère et que tout le monde n’est pas à même de faire fonctionner un ordinateur. Certains électeurs ont rapporté les difficultés qu’ils ont rencontrées face à un tel système et d’autres se sont même abstenus de voter.
Le système mis en place par la loi de 1994 organisant le vote automatisé ne permet plus de garantir au citoyen que son vote sera bel et bien respecté, que son opinion sera entendue. Il y a là ingérence dans la liberté d’expression des citoyens, ingérence qui n’est aucunement justifiée au regard des exigences de l’article 10 § 2 de la Convention européenne des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales. Si cette ingérence est bien prévue par une loi, elle ne poursuit en rien un but légitime. Est-il légitime de vouloir à tout prix, et c’est l’argument le plus souvent avancé, accélérer le processus de vote et de dépouillement sans apporter de sérieuses garanties ? D’autant qu’en pratique, le résultat escompté, à savoir, plus de rapidité, n’a pas été atteint (voir l’ensemble des coupures de presse relatant l’attente inacceptable des citoyens, pièce 14 à 19, et lettre de Monsieur le Bourgmestre d’Auderghem, pièce 13). Quoiqu’il en soit, la mesure choisie par l’Etat pour arriver à cette fin est totalement disproportionnée puisque au nom de la vitesse, c’est la démocratie et la garantie d’élections transparentes et honnêtes qui risquent d’être dévoyées.
2. L’utilité réelle du système
Les objectifs annoncés par les initiateurs de l’« expérience » du vote électronique ont-ils été réalisés ? Il est difficile à ce jour de répondre à cette question de manière définitive, vu le peu d’informations diffusées par le Ministère de l’Intérieur. Les sources d’informations sont dès lors les trois rapports des experts désignés par les divers parlements (élections de 1999, 2000 et 2003), des comptes rendus analytiques de débats à la Chambre et au Sénat, une étude publiée par l’Institut Emile Vandervelde (en janvier 2001, pièce 23) et divers articles de presse.
Les requérants peuvent néanmoins constater que les objectifs recherchés par le législateur à travers la loi sur le vote automatisé (énumérés en page 3 de la présente requête, dans l’exposé des faits) n’ont pas été rencontrés :
1. Ni au départ, ni aux différentes étapes (1991, 1994, 1999, 2000, 2003) de l’« expérience », aucun chiffre n’a été fourni aux parlementaires aussi bien concernant la difficulté de trouver des assesseurs qu’au sujet de la diminution du nombre des assesseurs nécessaires qu’aurait engendré le passage au vote électronique. Les seules choses que l’on peut affirmer de manière certaine sont que, du fait de l’automatisation, les assesseurs au dépouillement ont disparu mais qu’à contrario, les personnes mobilisées dans les bureaux où l’on vote électroniquement effectuent des prestations nettement plus longues que les autres : bureaux ouverts au moins jusqu’à 15 heures (au lieu de 13) et souvent, lors des dernières élections, jusqu’à 17 heures.
2. En ce qui concerne les économies que le passage à l’électronique permettrait de réaliser, par la diminution des frais de papier et celle du nombre des assesseurs, très peu d’informations ont été rendues publiques, ce qui rend bien sûr toute évaluation précise impossible. Voici cependant ce que dit l’étude publiée par l’institut Emile Vandervelde en 2001 : « aucun chiffre n’a été fourni concernant la première expérience de 1991 à charge de l’Etat, le coût de la réalisation des différents logiciels ou celui du coût d’investissement du matériel de la première vague d’automatisation acquise par l’Etat. On sait simplement que le vote automatisé représentait en 1999 pour les firmes Bull et Philips, un marché de 600 millions de FB. Selon le Ministère de l’Intérieur, le coût du scrutin automatisé s’élève à environ 35 FB par électeur et par élection. Il ne serait pas supérieur à celui du vote traditionnel (il semble d’ores et déjà exclu qu’il lui soit inférieur). Cette estimation repose toutefois sur l’affirmation d’un amortissement du matériel informatique réalisé sur 10 ans, ce qui semble a priori peu crédible quand on connaît la durée de vie de ce matériel (...). On ignore également si une série de frais connexes à l’automatisation ont été pris en compte : études préalables, frais de personnel au sein du Ministère, campagnes d’information spécifiques, assistance technique et réparations de matériel, ... ».
Et les auteurs de l’étude de conclure : « A défaut de disposer d’informations plus précises, le coût du vote automatisé apparaît en réalité supérieur à celui du vote traditionnel ».
L’élection de mai 2003, a confirmé le caractère éminemment « périssable » du matériel informatique : dès le début des opérations électorales, les ordinateurs en ordre de marche ont été moins nombreux que lors de l’élection précédente (ce qui explique en partie la longueur des files d’attente) et les pannes se sont multipliées tout au long de la journée. Les machines à voter déjà vielles de trois ans avaient des difficultés à lire les nouveaux programmes !
Et l’expérience du « ticketing » (voir plus loin) a bien sûr occasionné des frais supplémentaires.
3. L’introduction du vote électronique a-t-il permis que le résultat des élections soit connu plus rapidement qu’avec le système traditionnel ? On aurait pu l’espérer puisque ce système supprime les opérations de dépouillement. Et pourtant il n’en a rien été. Lors des dernières élections par exemple (mai 2003), les résultats des cantons bruxellois, pour lesquels, le vote électronique était partout de rigueur, ont été connus bien après la plupart des autres résultats. Ce paradoxe s’explique en partie par les retards accumulés durant les opérations de vote et sans doute aussi parce que quelques résultats manifestement aberrants ont donné lieu a de fastidieuses vérifications.
4. Le vote automatisé s’avère de plus non fiable techniquement. Il a fallu que des résultats aberrants apparaissent pour que l’on s’en rende compte (voir exposé des faits : l’incident de Schaerbeek).
Les conclusions sont donc les suivantes :
1°. avec le système du vote électronique des erreurs sont possibles (les rapports des experts en ont mentionné lors de chaque élection) ;
2 : Ces erreurs ne sont détectables que lorsque apparaissent des résultats aberrants. A contrario, dans le cas du système traditionnel (« vote papier »), non seulement chaque électeur peut être certain que c’est le vote qu’il a inscrit sur son bulletin qui sera lu par les assesseurs, mais encore les assesseurs au dépouillement sont là pour vérifier par recoupement les additions des résultats partiels qu’ils ont la charge d’établir.
Malgré l’indigence des informations fournies par le Ministère de l’Intérieur, on peut sans aucun doute conclure que ces « expériences » n’ont pas été concluantes, au moins pour trois des quatre objectifs poursuivis.
Troisième moyen : Violation de l’article 14 de la Convention européenne des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales
Cette disposition consacre la garantie pour chacun de jouir des droits et libertés reconnus par la Convention sans avoir à subir de discrimination.
Dans l’exercice de leur droit à la liberté d’expression, les requérants ont subi une discrimination puisqu’ils ont pris part à une élection ne présentant pas les garanties nécessaires contrairement à d’autres citoyens résidant dans d’autres communes et dont la situation est tout à fait comparable à la leur. Le fait que les élections n’aient pas été tenues de manière identique dans chaque commune du Royaume n’est en rien justifié. Rien ne justifie que des électeurs soient privés d’un de leurs droits les plus essentiels sous prétexte que leur commune a, ou a reçu, les moyens financiers d’organiser un tel système. La justification de cette différence de traitement qui serait basée sur les moyens financiers de la commune n’est pas relevante car elle ne concerne en rien les électeurs qui sont, eux, les premières victimes de la distinction. Ils ont désormais à faire les frais d’un système peu fiable et dangereux pour la démocratie. Ce n’est pas l’ensemble de la Belgique qui a fait les frais du système de vote automatisé mais certaines communes, choisies par arrêté royal (dont notamment, pour les élections de ce 18 mai 2003, l’ensemble des communes de la région bruxelloise).
Il convient de rappeler que la Belgique a signé le Protocole n° 12 de la Convention européenne des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales adopté par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe le 26 juin 2000. Ce faisant, le gouvernement belge a affiché sa volonté de reconnaître une protection beaucoup plus large et générale contre toute forme de discrimination. Même si l’Etat belge n’est pas encore officiellement lié par les obligations qui naîtront du Protocole, il ne peut désormais plus nier sa volonté d’élargir la notion de discrimination à toute différence de traitement dans la jouissance des droits reconnus par la loi belge.
L’application de la loi de 1994 a eu pour conséquence d’instaurer une distinction entre les électeurs du Royaume, distinction qui n’est pas justifiée de manière objective et raisonnable.
Quatrième moyen : violation de l’article 13 de la Convention européenne des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales
Le seul recours ouvert au recours à la suite de la tenue des élections du 18 mai 2003 est celui repris par les articles 231 et 232 du Code électoral qui prévoient que :
Article 231 :
« La Chambre des représentants et le Sénat se prononcent seuls sur la validité des opérations électorales en ce qui concernent leurs membres et en ce qui concernent les suppléants.
En cas d’annulation d’une élection, toutes les formalités doivent être recommencées, y compris les présentations de candidats ».
Article 232 :
« Toute réclamation contre l’élection doit être faite avant la vérification des pouvoirs »
Les requérants ont légitimement tenté, grâce à ce seul moyen mis à leur disposition, de remettre en cause un système de vote nuisible à l’institution de la démocratie en ce qu’il ne permet plus aux électeurs d’avoir un contrôle suffisant sur le déroulement du processus électoral.
Les requérants ont mis en œuvre les articles 231 et 232 du code électoral en déposant leurs réclamations aux Chambres nouvellement élues, censées vérifier elles-mêmes leurs pouvoirs.
Ils n’ont pas eu accès à un organe indépendant et impartial puisque ce sont les élus eux-mêmes qui sont amenés à vérifier les circonstances dans lesquelles se sont déroulées les élections qui ont entraîné leur entrée en fonction. On ne peut raisonnablement attendre de personnes nouvellement élues qu’elles remettent en cause le système qui a permis à leur nom de sortir des urnes. Le simple fait de leur demander pareille vérification pose déjà un problème en soi.
Aucun autre recours n’existe pour les électeurs. Les personnes qui ont déposé des réclamations à la Chambre et au Sénat n’ont en outre pas eu la possibilité d’être entendues. Leur réclamation a été lue en séance publique. Des commissions ont eu pour tâche de se pencher sur la question et leurs conclusions lapidaires ont été votées, sans aucune intervention possible des réclamants.
Le Sénat a quant à lui précisé que : « la vérification des pouvoirs a un double objet : contrôler, d’une part, si l’élu remplit toutes les conditions d’éligibilité et, d’autre part, si l’opération électorale qui a permis l’élection de l’intéressé est régulière. Il ne relève donc pas de la compétence du Sénat, dans le cadre de la validation des élections, de se prononcer sur des objections de principe mettant en cause la constitutionnalité de la loi du 11 avril 1994 (...) ». Le Sénat estime que cette argumentation suffit à rejeter la réclamation des requérants et à ne pas examiner plus loin les griefs formulés. Ces griefs concernaient pourtant, en premier chef, l’application de la loi 1994, ou plutôt sa non application, puisque certaines des garanties contenues dans celles-ci n’ont même pas été respectées (voir par exemple l’ensemble des incidents constatés, notamment par la première requérante, lors des opérations de vote au bureau 45 de la commune d’Auderghem). Le Sénat aurait dû faire état de ces différents points et répondre aux réclamations des requérants. En ne le faisant pas, il les a privés de tout recours utile.
Les électeurs ne possèdent donc aucun moyen de remettre valablement en cause le résultat des élections. Ils n’ont aucun recours effectif afin de faire valoir leurs droits, les dispositions de l’article 13 de la Convention ne sont donc pas respectées, en l’espèce.
Préjudice subi par les requérants et intérêt au recours
En tant qu’électeurs, les requérants ont le droit de participer à des élections libres devant se tenir de manière à garantir le respect des principes inhérents à toute démocratie. Le seul fait de pouvoir émettre un doute sur le mode de déroulement de ces élections cause un préjudice aux requérants.
Ceux-ci ont répondu à une convocation de leur commune, à Auderghem, situé dans la région de Bruxelles-Capitale. Ils n’ont pas eu le choix quant à la manière dont ils allaient être appelés à voter. Ils étaient donc tenus d’utiliser le système du « vote automatisé » mis en place dans leur commune.
Ils ont fait part, avant le vote de leur volonté de ne pas participer à ce système de vote automatisé.
Les requérants ne sont pas des personnes qui se désintéressent de la politique et qui ont trouvé là un moyen de se soustraire au vote qui est obligatoire en Belgique, bien au contraire. Les requérants sont des citoyens actifs dans leur commune. Ils se sont présentés tous trois aux élections communales qui se sont tenues le 8 octobre 2000. Madame MOCOLE, la première requérante a été élue à l’occasion de ces élections. Même en tant qu’élue, elle n’a pas hésité à introduire les recours qui lui étaient ouverts afin de mettre en cause le système du « vote automatisé ».
Les requérants sont soucieux de leurs droits.
La manière dont se sont déroulées les élections du 18 mai 2003, leur a causé un préjudice dont ils entendent obtenir réparation. En effet, ce système ne permet à l’électeur de contrôler les opérations de vote. Celles-ci ne sont plus aux mains du peuple mais sont désormais réservées à des « techniciens », des « experts » qui sont les seuls connaître le fonctionnement des machines et des logiciels nécessaires aux opérations.
Ce manque de transparence et ce manque de contrôle ont amené les requérants à ne pas prendre part à ce système et à renoncer à un droit essentiel, celui de voter.
IV. EXPOSE RELATIF AUX PRESCRIPTIONS DE L’ARTICLE 35 ’ 1 DE LA CONVENTION
STATEMENT RELATIVE TO ARTICLE 35 ’ 1 OF THE CONVENTION
16. Décision interne définitive - Final decision
Annales parlementaires : Compte rendu de la séance plénière du jeudi 5 juin 2003 du Sénat de Belgique : déclarant les réclamations des requérants non fondées (pièce 7) ;
Compte rendu analytique de la Chambre des représentants de Belgique, séance plénière du jeudi 5 juin 2003 : déclarant que les réclamations des requérants sont non fondées (pièce 8).
17. Autres décisions intéressant la procédure
Décision du Conseil d’Etat (Section administration) du 16 novembre 1999 rouvrant les débats concernant le refus du Ministre de l’intérieur d’accorder à un citoyen l’accès aux documents administratifs relatifs au vote automatisé (pièce 24).
Décision du Conseil d’Etat (Section administration) du 21 mai 2001, annulant la décision du 18 décembre 1997 par laquelle le Ministre de l’Intérieur refusait explicitement l’accès aux documents administratifs relatifs au vote automatisé (pièce 25).
Décision de la présidente du tribunal de première instance de Bruxelles, rendue en référé le 15 septembre 2000, reconnaissant le caractère fondé des arguments de certains électeurs demandant de ne pas appliquer la loi du 11.4.1994 organisant le vote automatisé et l’arrêté royal du 30.3.1998 portant désignation des cantons électoraux pour l’usage d’un système de vote automatisé aux élections qui auront lieu le 8 octobre 2000 dans les communes de Saint-Gilles et d’Ixelles. Cette décision refuse néanmoins de prononcer une telle mesure provisoire, l’estimant légalement impraticable (pièce 26).
Décision du tribunal de première instance du 9 février 2001 se déclarant sans compétence pour annuler les élections du 13.6.1999 et refusant d’accorder aux demandeurs une réparation pécuniaire pour le dommage subi à l’occasion de ces élections (pièce 27).
Décision du Collège juridictionnel de la Région Bruxelles-Capitale du 28 octobre 2000, rejetant la réclamation des actuels requérants relative au déroulement des élections du 8 octobre 2000 à Auderghem (pièce 28).
Arrêt du Conseil d’Etat de Belgique (Section administration) du 16 février 2001, concluant au rejet de la requête, confirmant la décision du Collège juridictionnel du 28 octobre 2000 et validant les élections qui ont eu lieu à Auderghem le 8 octobre 2000 (pièce 29).
18. Les requérants ne disposent pas d’un autre recours prévu par le droit interne, seul le recours auprès des élus eux-mêmes est prévu. En outre, un éventuel recours à la Cour d’Arbitrage de Belgique n’aurait pas permis de rencontrer l’ensemble des griefs invoqués par les requérants à l’encontre du déroulement des élections à Auderghem, commune dans laquelle la nouvelle loi sur le vote automatisé a été appliquée.
V. EXPOSE DE L’OBJET DE LA REQUETE ET PRETENTIONS PROVISOIRES POUR UNE SATISFACTION EQUITABLE
STATEMENT OF THE OBJECT OF THE APPLICATION AND PROVISIONAL CLAIMS FOR JUST SATISFACTION
19.
Les requérants demandent à la Cour de déclarer la présente requête recevable et de déclarer fondés les quatre moyens repris ci-avant, à savoir les violations des articles 13, 10 et 14 de la Convention européenne des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales et de l’article 3 du Protocole de 1952 de ladite Convention.
Les requérants se réservent également de demander une juste indemnisation du préjudice subi à l’encontre de l’Etat belge et la condamnation de celui-ci à tous les frais.
VI. AUTRES INSTANCES INTERNATIONALES TRAITANT OU AYANT TRAITE
L’AFFAIRE
STATEMENT CONCERNING OTHER INTERNATIONAL PROCEEDINGS
20.
Les requérants n’ont pas soumis à une autre instance internationale d’enquête ou de règlements les griefs énoncés dans la présente requête, mais ils demandent expressément que le recours qu’ils ont introduit tout trois après les élections communales du 8 octobre 2000, et qui porte également sur la procédure de vote automatisé, soit examiné concomitamment au présent recours, même s’il porte sur un type d’élection différent.
VII. PIECES ANNEXEES - LIST OF DOCUMENTS
21. L’inventaire des pièces figure en annexe
VIII. DECLARATION ET SIGNATURE
DECLARATION AND SIGNATURE
Les requérants ne souhaitent pas garder l’anonymat et déclarent en toute conscience et loyauté que les renseignements qui figurent sur la présente formule de requête sont exacts.
Bruxelles, le 29 août 2003
Signature des requérants et de leurs avocats
I N V E N T A I R E
1 : Loi du 11 avril 1994, organisant le vote automatisé ;
2 : Lettre adressée par Madame MOCOLE à Monsieur Christian PANIER, président du collège électoral francophone pour le Sénat ;
3 : Recours des requérants auprès du Collège électoral de la région de Bruxelles-Capitale ;
4 : Recours des requérants auprès du Conseil d’Etat ;
5 : Réclamation adressée par les requérants au Sénat, en date du 27 mai 2003, afin de demander la vérification de ses pouvoirs ;
6 : Réclamation adressée par les requérants à la Chambre des Représentants, en date du 27 mai 2003, afin de demander la vérification de ses pouvoirs ;
7 : Annales parlementaires : Compte rendu de la séance plénière du jeudi 5 juin 2003 du Sénat de Belgique : déclarant les réclamations des requérants non fondées ;
8 : Compte rendu analytique de la Chambre des représentants de Belgique, séance plénière du jeudi 5 juin 2003 : déclarant que les réclamations des requérants sont non fondées.
9 : Lettre adressée par le Greffier du Sénat à Madame Alexandra MOCOLE en date du 13 juin 2003 ;
10 : Rapport du collège d’experts chargés du contrôle des systèmes de vote et de dépouillement automatisés, en date du 18 octobre 2000 (faisant suite aux élections du 8 octobre 2000) ;
11 : Demande de Madame Alexandra MOCOLE, adressée à Madame la présidente du bureau principal du canton d’Ixelles afin d’obtenir copie du procès-verbal de l’élection du 18 mai 2003 pour le 45ième bureau de la commune d’Auderghem, en date du 27 mai 2003 ;
12 : Lettre de Madame BODENSTAB, juge de Paix du canton d’Ixelles et présidente du bureau principal du canton d’Ixelles, en date du 28 mai 2003 ;
13 : Lettre de Monsieur le Bourgmestre et du Collège des Echevins de la commune d’Auderghem adressée à Monsieur le Ministre de l’Intérieur, en date du 22 mai 2003 ;
14 à 19 : Extraits de quotidiens relatant les difficultés liées au système de vote automatisé à la suite des élections du 18 mai 2003 ;
20 et 21 : Témoignages de citoyens ayant pris part aux opérations de vote du 18 mai 2003 ;
22 : Rapport du collège d’experts chargés du contrôle des systèmes de vote et de dépouillement automatisés concernant les élections du 18 mai 2003 ;
23 : Etude de l’Institut Emile Vandervelde, janvier 2001 ;
24 : Décision du Conseil d’Etat (Section administration) du 16 novembre 1999 rouvrant les débats concernant le refus du Ministre de l’intérieur d’accorder à un citoyen l’accès aux documents administratifs relatifs au vote automatisé ;
25 : Décision du Conseil d’Etat (Section administration) du 21 mai 2001, annulant la décision du 18 décembre 1997 par laquelle le Ministre de l’Intérieur refusait explicitement l’accès aux documents administratifs relatifs au vote automatisé ;
26 : Décision de la présidente du tribunal de première instance de Bruxelles, rendue en référé le 15 septembre 2000, reconnaissant le caractère fondé des arguments de certains électeurs demandant de ne pas appliquer la loi du 11.4.1994 organisant le vote automatisé et l’arrêté royal du 30.3.1998 portant désignation des cantons électoraux pour l’usage d’un système de vote automatisé aux élections qui auront lieu le 8 octobre 2000 dans les communes de Saint-Gilles et d’Ixelles. Cette décision refuse néanmoins de prononcer une telle mesure provisoire, l’estimant légalement impraticable ;
27 : Décision du tribunal de première instance du 9 février 2001 se déclarant sans compétence pour annuler les élections du 13.6.1999 et refusant d’accorder aux demandeurs une réparation pécuniaire pour le dommage subi à l’occasion de ces élections ;
28 : Décision du Collège juridictionnel de la Région Bruxelles-Capitale du 28 octobre 2000, rejetant la réclamation des actuels requérants relative au déroulement des élections du 8 octobre 2000 à Auderghem ;
29 : Arrêt du Conseil d’Etat de Belgique (Section administration) du 16 février 2001, concluant au rejet de la requête, confirmant la décision du Collège juridictionnel du 28 octobre 2000 et validant les élections qui ont eu lieu à Auderghem le 8 octobre 2000 ;
30 : Loi du 11 mars 2003 organisant un système de contrôle du vote automatisé par impression des suffrages émis sur support papier et modifiant la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé, la loi du 18 décembre 1998 organisant le dépouillement automatisé des votes au moyen d’un système de lecture optique et le code électoral.
* * *