Bref état de la situation [1]
En Europe
Malgré un lobbying intense et persévérant des sociétés industrielles et commerciales concernées, à ce jour, seuls deux des vingt-sept Etats de l’Union européenne utilisent sur une grande échelle des systèmes automatisés de vote et de totalisation : les Pays-Bas et ... la Belgique.
Les Pays-Bas sont les seuls à imposer l’usage de ces systèmes électroniques à une majorité des électeurs (90 %). Mais l’association de citoyens « Wij vertrouwen stemcomputers niet » ayant démontré le manque de sécurité d’un des systèmes utilisés, un fabricant (SDU) a été récemment suspendu d’élection (ce qui a entraîné, lors des dernières élections, le retour au vote papier pour environ 10 % des électeurs) et une commission a été formée qui devrait livrer ses conclusions fin 2007. [2]
En Allemagne et en France, environ 3 % seulement des électeurs sont concernés. Lors du premier tour des élections présidentielles françaises de 2007, les machines à voter ont souvent occasionné des problèmes d’utilisation et suscité la méfiance de nombreux électeurs ; ce qui a incité plusieurs maires à décider la suppression de ce mode de scrutin dès le second tour de cette élection.
Dans les autres Etats de l’Union, le vote électronique n’est utilisé qu’à titre expérimental, sur une très petite échelle, ou pas utilisé du tout.
En Italie, toutes les expérimentations ont été abandonnées suite au scandale qui a éclaté concernant des manipulations malveillantes lors des opérations de totalisation automatisée des votes en 2006 (des votes blancs auraient été transformés en vote Berlusconi).
En Irlande, après quelques années d’expérimentation et malgré l’opposition d’un nombre grandissant de citoyens et de parlementaires, le gouvernement avait fait acheter 7.500 ordinateurs de vote, pour un montant de 52 millions d’euros en vue des élections de 2004. Mais suite à une levée de boucliers de l’opposition parlementaire et à deux rapports accablants de la « Commission on Electronic Voting » (formée à l’initiative du parlement), ces machines n’ont jusqu’ici pas été utilisées. [3]
Le vote par Internet : ce système qui ne peut absolument pas assurer le secret du vote (puisque rien ne garantit que l’électeur sera seul au moment d’effectuer son choix) n’existe qu’à un stade expérimental dans quelques pays. Les États en pointe sont la Suisse et l’Estonie.
Hors d’Europe
Même si quelques grandes démocraties utilisent de manière importante différents types de vote électronique, à l’échelle du monde ces systèmes automatisés restent très largement minoritaires.
Seuls l’Inde et le Brésil en ont adopté pour 100 % de leur électorat. Dans ces deux cas il n’existe aucune possibilité de recomptage fiable des votes (pas de bulletin papier). Au Brésil le passage du vote manuel au vote électronique s’est fait sans aucun débat démocratique grâce au pouvoir exorbitant du « Tribunal Supérieur Electoral ». [4]
Au Venezuela, il concerne plus de 90 % des électeurs. En 2000 les élections ont dû être reportées suite à un problème technique majeur. [5] A noter que dans ce pays, lors des élections de 2006 les électeurs se sont vu délivrer un papier imprimé par l’ordinateur de vote, qu’ils ont déposé eux-mêmes dans une urne électorale. Après le scrutin, plusieurs millions de ces bulletins ont été comptés et les résultats ont été comparés à ceux des machines électroniques. Nous ne disposons cependant pas de chiffres concernant le coût - certainement très supérieur non seulement au vote papier mais encore au vote électronique sans trace papier - de cette procédure.
Aux États-Unis, lors des élections législatives de novembre 2006, environ trois quarts des électeurs ont été soumis à différents systèmes de vote automatisé. Dans la moitié des cas environ, il s’agissait de lecture optique de bulletins papier. Mais depuis l’élection présidentielle de novembre 2000 de nombreux problèmes ont été détectés. [6] Ce qui explique qu’aujourd’hui, vingt-six Etats américains utilisant des systèmes informatisés ont introduit dans leur législation l’obligation de produire des bulletins en papier susceptibles d’être recomptés. D’autres, dont la Floride, ont décidé d’abandonner les ordinateurs de vote et d’utiliser la lecture optique des bulletins papier.
Au Canada, le vote électronique n’a jusqu’à présent été utilisé que dans des élections locales. Au Québec, un moratoire a été décidé suite aux multiples problèmes rencontrés lors des élections municipales de 2005.
Malgré l’opacité des systèmes de vote et de dépouillement électroniques, de nombreux disfonctionnements, fortuits ou délibérés, ont été constatés lors de toutes les élections utilisant des procédés automatisés.
[1] Pour plus de détails, lire l’enquête sur le vote électronique parue dans Sciences et Vie n° 1073, février 2007 ,pp. 98 à 109 (également disponible à l’adresse www.ordinateurs-de-vote.org/Election-piege-a-couac.html), les articles de la rubrique « Hors de Belgique » du site Internet www.poureva.be ainsi que ceux de la rubrique « A l’étranger » du site Internet www.ordinateurs-de-vote.org.
[2] Pour plus de détails : Pays-Bas ou www.ordinateurs-de-vote.org/-Pays-Bas-.html.
[3] Pour plus de détails : Irlande ou www.ordinateurs-de-vote.org/-Irlande-.html.
[4] Pour plus de détails, lire l’article « Brève histoire du vote électronique au Brésil » (www.ordinateurs-de-vote.org/Breve-histoire-du-vote.html)
[5] Cf. Sciences et Vie n° 1073, p. 102.
[6] Cf. ibidem, pp. 102, 103 et 106 à 109.