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20/02/2008: Proposition de carte blanche : Le futur du contrôle citoyen des élections.


par David Glaude, informaticien et webmaster de l’association Pour une
Ethique du Vote Automatisé

Le Ministère de l’Intérieur a commandé à un consortium d’universités
belges un rapport en deux parties sur le vote électronique. Une partie
étudie la situation internationale et l’autre propose un système : « le
futur du vote électronique en Belgique ».

Les auteurs de cette étude ont manifestement ignoré ceux qui depuis plus de dix ans se battent pour que le vote électronique respecte une
certaine éthique. Cette carte blanche est destinée à ces chercheurs mais
surtout aux responsables politiques qui se risqueraient à faire des choix coûteux basés sur ce rapport biaisé.

Dans un Etat démocratique, les élections sont, en principe, l’affaire de
tous. Le pouvoir est, l’espace d’une journée, dans les mains des
électeurs. Si on leur demande de faire confiance à de gentils
organisateurs ou à un petit nombre d’experts, aussi experts ou
indépendants soient-ils, on leur retire le contrôle des élections.

L’électeur doit avoir la garantie qu’aucun lien ne peut être fait entre
son bulletin et son identité. L’inscription de l’électeur doit se faire
sans support informatique qui pourrait retenir l’heure ou l’ordre des
électeurs. En particulier, avec la carte d’identité électronique, il
faut la vérifier visuellement, sans lire la puce. Un système de vote par
internet vous demandera de vous identifier puis de voter sur le même
ordinateur. C’est une des nombreuses raisons qui rendent le vote par
internet inacceptable.

L’électeur doit pouvoir vérifier son bulletin de vote et avoir la
garantie que c’est ce choix vérifié qui sera compté. Le contenu des
cartes magnétiques utilisées dans le système actuel ne peut être vérifié
à l’œil nu. La nouvelle proposition de puce RFID pose le même problème
mais surtout son contenu peut être lu ou modifié à distance à l’insu de
l’électeur. Seul le bulletin papier a la permanence et la transparence
nécessaire, encore faut-il que la volonté de l’électeur ne soit pas
encodée dans un code barre illisible comme le proposent les chercheurs.

Un code barre sur un bulletin de vote fait ressembler les élections à du
shopping électoral. Et le système proposé fait tout pour rendre
impossible la vérification du contenu du code barre dans le bureau de
vote ou dans le "bureau de lecture". Tout au plus un recomptage des
bulletins papiers est envisagé en cas de contestation.

Les membres du bureau doivent pouvoir vérifier que les électeurs votent
sans contrainte et sans influence. C’est pourquoi il faut absolument
conserver le système des isoloirs placés dans un lieu (le bureau de
vote) où chaque électeur est sous la surveillance d’autres électeurs
pouvant constater que le secret du vote de chacun de leurs concitoyens
est respecté. C’est pourquoi tout système de vote à distance doit être
banni.

Comme le recommande l’OSCE, le transport des urnes doit être évité et la pratique belge de mélanger des urnes de différents bureaux doit cesser.
Si on veut conserver l’impossibilité de savoir comment tel ou tel
quartier vote, on peut le faire par une répartition plus aléatoire,
variable ou mélangée des électeurs dans les bureaux de vote. La Belgique doit également respecter ses engagements et prévoir dans la loi la possibilité d’avoir des observateurs non partisans qui surveillent les
élections.

Afin de pouvoir observer la totalisation, il faut que tous les résultats
partiels soient connus et rendus public avant d’être transmis. La
transmission électronique des résultats provisoires ne peut remplacer la
transmission des résultats officiels établis par et sous le contrôle de
citoyens-électeurs non spécialistes.

Pour protéger le secret du vote, en cas d’élections simultanées, il faut
que chaque élection fasse l’objet d’un bulletin de vote séparé. Sinon
les électeurs non-belges, qu’ils soient européens ou non, et qui n’ont
qu’un droit de vote limité, verraient le secret de leur vote non garanti
lorsqu’ils sont seul électeur de ce type dans un bureau de
dépouillement.

Pour que l’électeur ne puisse pas prouver son vote à un assesseur ou
témoin de parti, il faut interdire ou fortement limiter le vote de préférence multiple qui permet trop de possibilités. Ceci est beaucoup plus respectueux du principe "un homme une voix" et évite toute possibilité de pression ou d’influence.

Les Pays-Bas était le seul Etat membre de l’Union Européenne qui imposait le vote électronique à la majorité de ses citoyens. Le gouvernement néerlandais vient de décider le retour au vote papier pour les prochaines élections. La Belgique peut éviter d’investir dans un nouveau système qui n’est pas prévu pour garantir un contrôle effectif et efficace des élections par les citoyens.

Il faut cesser d’essayer de gagner la confiance des citoyens par des ersatz de transparence ou le contrôle d’experts. Seul la véritable transparence peut permettre le contrôle démocratique des élections, celui qui protège des bugs et des tentatives de fraude. Le vote électronique ne sera jamais aussi transparent et économique que le vote papier.