15/09/2008: Lettre aux communes "automatisées" (2008)
Combien de communes renonceront-elles au vote électronique lors des prochaines élections ?
La résolution votée à la Chambre le 10 juillet 2008 donne la possibilité à chaque commune ayant utilisé le vote électronique précédemment d’y renoncer dès maintenant. PourEVA argumente dans ce sens ...
A l’attention des collèges des Bourgmestre et échevins des communes qui ont utilisé un système de vote électronique lors des élections du 10 juin 2007.
Concerne : organisation des élections du 7 juin 2009
Madame, Monsieur le Bourgmestre,
Mesdames et Messieurs les échevins,
Nous vous écrivons en tant que représentants de l’association de citoyens « PourEVA » (Pour une Ethique du Vote Automatisé - www.poureva.be ).
Le 10 juillet dernier, la Chambre a voté une résolution demandant au gouvernement de donner la possibilité aux communes ayant utilisé le système de vote automatisé lors des dernières élections de choisir pour les élections de juin 2009 entre ce système et celui du vote papier, tel qu’il restait pratiqué en 2007 par 56 % des électeurs. Ce qui a amené le Ministre de l’Intérieur à vous adresser, à la mi-juillet, un courrier vous demandant d’effectuer ce choix pour le 30 septembre 2008 au plus tard. Dans cette lettre, le Ministre précise que des communes d’un même canton peuvent effectuer des choix différents.
C’est dans ce contexte que nous nous adressons à vous aujourd’hui. Nous voudrions en effet attirer votre attention sur certains points qui devraient vous amener à profiter de la possibilité qui vous est aujourd’hui offerte de choisir entre deux systèmes de vote et de comptabilisation de ceux-ci, pour opter pour le retour au vote papier.
1. Nous clamons depuis de longues années que le système automatisé utilisé en Belgique est inacceptable car totalement hors du contrôle des citoyens-électeurs. Pour nous, des innovations techniques ne peuvent être utilisées lors des élections que si elles sont compatibles avec ce principe de base qui doit régir une démocratie représentative : le jour des élections c’est l’ensemble des citoyens-électeurs qui exercent la souveraineté. C’est donc à eux qu’appartient le contrôle de la régularité des opérations électorales et non, comme c’est le cas dans les communes « automatisées », à des « experts » émanant des pouvoirs en place ou de firmes privées.
2. Contrairement à ce que prétendent les défenseurs du système automatisé actuel, les objectifs visés par les promoteurs de cette « expérience » n’ont pas été atteints :
- D’après le Ministère de l’Intérieur (chiffres communiqués - enfin ! - en mai 2005 - cf. http://www.poureva.be/spip.php?article227 ), le système automatisé coûte trois fois plus cher que le système traditionnel.
- De nombreux incidents ont émaillé chacun des scrutins ; c’est ainsi que des résultats aberrants ont été détectés à plusieurs reprises. Ce système n’est donc pas infaillible, loin de là.
- Du fait de ces nombreux incidents, les résultats des cantons « automatisés » ont souvent été connus après ceux des cantons « papier ».
- Le seul objectif atteint, dans une certaine mesure, est la diminution du nombre de citoyens mobilisés pour les opérations électorales. Mais est-ce vraiment un avantage ? Une démocratie représentative n’a-t-elle pas intérêt au contraire, dans un souci de pédagogie citoyenne, à faire des jours d’élections des moments de grande mobilisation populaire, de célébration active de ce moment rare où s’exerce la souveraineté populaire ?
Pour un bilan plus complet de l’« expérimentation » du vote automatisé en Belgique, lire notre « Aperçu historique et bilan de seize années d’« expérimentation » des systèmes de vote automatisés » (http://www.poureva.be/spip.php?article427).
3. Dans le rapport « BeVoting. Etude des systèmes de vote électronique » rédigé par un consortium d’universitaires à la demande des administrations fédérales et régionales et rendu public en décembre 2007, on peut lire que le système électronique utilisé en Belgique ne répond pas à toute une série d’exigences du Conseil de l’Europe en la matière (Partie I, pp. 254-255). Plus loin, les auteurs concluent « que le vote électronique entièrement automatisé ne convient pas, à l’heure actuelle, pour la Belgique » (Partie II, p. 6).
4. Le rapport de l’O.S.C.E. concernant les élections de juin 2007 condamne également notre système à cause de son manque de contrôlabilité.
5. Le matériel informatique utilisé est périmé : une partie des machines ont été mises en service en 1994, les autres en 1998. Tous les contrats d’entretien et de maintenance arriveront à leur échéance le 31 décembre 2008. Prolonger la vie de ce vieux matériel est risqué et nécessitera de toute façon de nouveaux contrats d’entretien dont les frais seront à charge des communes, comme le rappelle le Ministre dans sa lettre. Et ces frais ne pourront ni être amortis sur plusieurs élections ni être considérés comme un investissement puisque le système actuel ne sera de toute façon plus utilisé après 2009.
6. Après le renoncement définitif des Pays-Bas au vote électronique (lire http://www.poureva.be/spip.php?article534), si la Belgique persiste à utiliser le vote électronique lors des prochaines élections dans les mêmes proportions que depuis 1999 (depuis cette date, 44% des électeurs de Belgique sont soumis au vote électronique), elle sera le SEUL parmi les 27 Etats de l’Union européenne à encore imposer un système automatisé à un nombre significatif d’électeurs. Le vote électronique est en effet partout en recul dans le monde, particulièrement celui sans preuve papier recomptée. Ailleurs dans le monde, de plus en plus d’Etats ayant expérimenté des systèmes de vote automatisé font machine arrière.
Nous espérons donc, Madame, Monsieur le Bourgmestre, Mesdames, Messieurs les échevins, que vous aurez à cœur de profiter de la latitude qui vous est laissée, pour prendre la décision qui s’impose à tout démocrate et bon gestionnaire des deniers publics, celle d’en finir avec un système très coûteux, non fiable et dont le manque de transparence prive les citoyens-électeurs de toute possibilité de contrôler leurs élections.
Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir nous communiquer la décision que vous aurez prise à ce sujet.
Pour l’association de citoyens PourEVA,
Patricia Fenerberg, Kommer Kleijn, Michel Staszewski
PourEVA, association indépendante de tout parti politique, regroupe des citoyens qui s’opposent depuis longtemps au système du vote automatisé tel qu’il se pratique actuellement en Belgique car il prive les électeurs de toute possibilité de contrôler les élections auxquelles ils sont appelés à participer. Nos membres sont tous animés par un objectif commun : le retour à un système de vote et de dépouillement démocratique.
Pour Une Ethique du Vote Automatisé, 36 Av. des Martinets 1160 Bruxelles