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04/12/2011: Le système de vote testé le 27 octobre 2011 n’est pas satisfaisant


Le système de vote électronique testé le 27 octobre 2011 n’est pas un système de vote démocratique. Voyons pourquoi.

Contexte

Le système de vote électronique utilisé jusqu’aux dernières élections (juin 2010) est obsolète. Il faut donc le remplacer par un autre système de vote, papier ou automatisé.

Bien que le vote électronique soit en net recul partout dans l’Union européenne (la Belgique est le seul Etat où un nombre important d’électeurs reste contraint de faire confiance à un système qui n’est contrôlable que par des spécialistes en informatique), les pouvoirs publics fédéraux ont lancé un appel d’offre pour un système de vote automatisé basé sur les conclusions du rapport BeVoting.
La société retenue pour construire ce prototype est Smartmatic. Et c’est avec ce prototype arrivé avec un certain retard que la Flandre et Bruxelles ont décidé d’organiser avec le fédéral une journée de test le 27 octobre 2011.

Le système Smartmatic s’écarte quelque peu des recommandations du rapport BeVoting. Bien que PourEVA ne considère pas les recommandations du rapport BeVoting comme suffisantes pour assurer un système de vote démocratique, nous aurions bien voulu connaître les justifications des changements. Ceux que nous avons pu observer ont été repris ici.

Description succincte du système de vote Smartmatic

Le système proposé par Smartmatic est un système doté d’une machine à voter au moyen de laquelle l’électeur effectue ses choix au moyen d’un écran tactile. Une fois le vote confirmé, la machine imprime un ticket qui reprend le choix de l’électeur (lisible par l’électeur) et un code-barres en deux dimensions (QR code). L’électeur doit ensuite scanner le code barre de son ticket de vote avant de glisser ce dernier dans l’urne.

Potentiellement, l’électeur pourrait vérifier son bulletin de vote sur une autre machine qui afficherait les choix de l’électeur après avoir scanné le code-barres. Ceci suppose d’ajouter un ordinateur dans chaque bureau de vote électronique.

Pour avoir accès à la machine de vote, l’électeur se fait remettre une carte à puce (jeton) qui se comporte comme une clef permettant à l’électeur d’exprimer son vote et qui après insertion de la carte dans la machine à voter, donne l’accès aux élections pour lesquelles l’électeur à le droit de voter. Cette carte à puce est réutilisée par plusieurs électeurs et est à chaque fois réinitialisée.

Adaptation de la loi électorale

Rappelons que pour pouvoir utiliser cette machine lors d’élections à venir, la loi électorale doit être adaptée en conséquence. En effet, la loi actuelle est prévue pour le système à cartes magnétiques et pour le vote papier. Aucun projet de nouvelle loi électorale n’ayant été publié à ce jour, il reste encore un grand nombres d’inconnues pour évaluer le système de vote Smartmatic. Notre analyse se base donc sur nos connaissances actuelles du système.

Election démocratique = transparence

Pour qu’une élection soit démocratique, il faut qu’elle soit contrôlée par le citoyen. Le vote papier permet ce contrôle. Le système à carte magnétique ne permet pas à un non-initié de lire ce qu’il y a sur une carte magnétique, il a besoin d’une machine dont il ne peut pas contrôler le fonctionnement. Il faut également que le vote soit vérifiable et vérifié, c’est-à-dire qu’on puisse recompter manuellement les votes.

Qu’en est-il du système Smartmatic proposé ?

Le vote lisible par un être humain doit être le seul vote valable

Le système proposé comporte l’impression, dans l’isoloir, d’un ticket de vote hybride qui contient le vote, d’une part sous une forme lisible par l’électeur, d’autre part sous une forme lisible uniquement par un ordinateur.

C’est la forme non compréhensible et non vérifiable par le citoyen qui sera comptabilisée avec le prototype. Ceci n’est pas acceptable.

Seul un être humain peut déterminer la validité d’un vote et ceci nécessite une inspection du bulletin

Un ticket de vote comme ceux produits par le prototype ne peut être considéré comme valable s’il existe sur celui-ci des inscriptions qui peuvent permettre d’identifier l’électeur. La seule vérification faite par le président du bureau de vote qui consiste à contrôler que le code-barres soit lisible par l’ordinateur n’est pas suffisante pour déterminer si un vote est valable.

Le contenu de l’urne peut-être très différent de celui comptabilisé par l’ordinateur du président de bureau

En plus du fait que certains tickets de vote hybrides peuvent être en fait des votes nuls (voir ci-dessus), il est impossible de garantir que l’ensemble des tickets scannés par l’ordinateur du président de bureau correspond à l’ensemble des tickets dans l’urne. C’est l’électeur qui scanne son ticket hybride et l’insère dans l’urne. Il peut donc décider de conserver son ticket et de ne rien insérer dans l’urne, ou d’insérer autre chose.

Le système de jeton de vote ne permet pas de contrôle du nombre de votants

Avec le vote papier, et même avec le vote par carte magnétique, on connaît le nombre de supports de vote (bulletin papier ou carte magnétique) disponibles à l’ouverture du bureau de vote. Ce nombre est comparé avec le nombre d’électeurs s’étant présenté et le nombre de supports restant.

Cette vérification de base n’est plus possible avec ce prototype Smartmatic.

Le prototype ne permet pas de contrôler qu’un électeur non belge ne vote pas pour une élection pour laquelle il n’a pas le droit de vote

Pour des élections simultanées, où tous les citoyens n’ont pas le même droit de vote, il y a un problème de contrôle du fait qu’un électeur non belge ne vote pas pour une élection pour laquelle il n’a pas de droit. Ce problème est présent avec le vote par carte magnétique et est conservé dans le prototype.

Avec le vote papier, des bulletins séparés pour chaque scrutin sont distribués aux électeurs. Un électeur non Belge ne reçoit pas de bulletin pour les élections auxquelles il ne peut participer et ceci est parfaitement visible et vérifiable par les membres du bureau de vote et les témoins de parti.

Avec le système de jeton utilisé dans le prototype, un jeton destiné à un électeur belge peut-être donné à un non belge, par erreur ou volontairement, sans que ceci ne soit visible (sauf pour l’électeur lui-même).

Le système proposé ne respecte pas le secret du vote des électeurs non belges

Pour des élections simultanées, où tous les citoyens n’ont pas le même droit de vote (voir ci-dessus) il y a également un problème de respect du secret du vote pour les électeurs non belge.

Le secret du vote de ces électeurs n’est pas respecté avec le prototype car le vote de plusieurs élections est imprimé sur le même ticket hybride. En effet, les bulletins de vote des non-belges est facilement identifiable lors d’un dépouillement humain.

Tout dépouillement humain est rendu inefficace

Le but d’un ticket de vote hybride est de pouvoir le compter, le recompter mais surtout de vérifier que la partie informatique du système de vote ne commet pas d’erreur volontaire (fraude) ou involontaire (bug).

Afin de pouvoir manier correctement les bulletins de vote, ceux-ci doivent être d’une taille suffisante pour être déplacés et empilés pour un comptage et un recomptage.

Les tickets du prototype contiennent les votes de plusieurs élections, il ne peuvent donc être empilés par élection car le même ticket doit servir pour plusieurs comptages. De plus, par leur taille et le fait qu’ils ont une tendance à s’enrouler, ils sont peu propices à un comptage humain.

De plus, la totalisation de tous les résultats d’un canton oblige en cas de recomptage humain à tout devoir recompter. Ceci montre bien qu’un contrôle citoyen effectif et efficace n’est absolument pas prévu dans le prototype et que l’impression papier est une illusion de contrôle démocratique.

La taille de la police de caractère sur le ticket est trop petit

Le nom des candidats choisis est écrit en tout petit sur le ticket, ce qui peut poser problème à certains électeurs (notamment les personnes âgées ou ayant une vue déficiente), mais également lors du recomptage.

Conclusion

Selon ce que nous avons pu observer ce 27 octobre 2011 lors du test, le système proposé par Smartmatic ne répond pas aux critères d’un système de vote démocratique .

Post-scriptum : système vérifiable mais non vérifié

On peut dire sans se tromper que le système de vote électronique proposé n’est pas prévu pour qu’il y ait un comptage citoyen. Bien que vérifiable, il reste non vérifié. Même si la vérification ultime qui consiste à recompter tous les bulletins de vote était mise en oeuvre, elle serait rendue totalement inefficace par la taille et la forme de ces bulletins.

La seule vérification possible est celle de l’électeur lui-même qui peut observer si il y a des différences entre son intention exprimée par le truchement de l’ordinateur de vote et ce qui est lisiblement imprimé sur le bulletin de vote. Cette vérification est optionnelle et rendue difficile par la taille du bulletin. Il semble évident que de nombreux électeurs n’effectueront pas cette vérification.

PourEVA