23/09/2003: Le « ticketing » : voyage en absurdie ? et dans l’illégalité
Extrait de notre Lettre ouverte aux membres du parlement fédéral de Belgique et autres informations à propos de l’expérience de « ticketing ».
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L’expérience du « ticketing » a bien sûr occasionné des frais supplémentaires. [1]
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Dans le souci « d’augmenter la confiance du public » (et non la capacité de contrôle des citoyens, notons-le), le gouvernement a fait adopter par le parlement la loi du 11 mars introduisant, à titre expérimental (encore une fois !), dans deux cantons électoraux, « un système de contrôle du vote automatisé par impression des suffrages émis sur support papier ». Il s’agissait concrètement d’offrir la possibilité à l’électeur de visualiser, sur un « ticket » défilant derrière une vitre, les votes apparus sur l’écran de l’ordinateur.
Nous avons déjà fait remarquer que cette loi organisait le viol du secret du vote puisque dans le cas où l’électeur constatait que les votes qui apparaissaient sur l’écran ne correspondaient pas à ceux qui figurent sur le « ticket », il était obligé de faire constater cette différence par le président du bureau de vote pour obtenir le droit de revoter (article 8).
La loi prévoyait aussi (article 9) que les tickets devaient être comptabilisés par des assesseurs prévus à cet effet et que le président du bureau principal de canton devait vérifier la concordance entre les résultats de la totalisation des votes enregistrés sur les cartes magnétiques et ceux donnés par le dépouillement manuel des « tickets ». Il était encore précisé qu’à défaut de concordance, la priorité serait accordée aux résultats du dépouillement des documents imprimés.
Cette expérience a été un échec.
Le « ticketing » c’est avéré être un système encore plus lent que le vote électronique sans ticket. Le comptage des tickets s’est révélé extrêmement fastidieux [2]. Dans l’un des deux cantons concernés, celui de Waarschoot, le comptage manuel a donné un résultat différent de la totalisation électronique [3]. Dans un « complément au rapport du collège d’experts chargé du contrôle du vote automatisé, concernant l’expérience « ticketing » à Waarschoot et Verlaine » marqué « CONFIDENTIEL » [ pourquoi ? ] on peut lire : « L’expérience est concluante dans la mesure où, au niveau du vote, la concordance entre le vote visualisé à l’écran et imprimé a pu être établie dans l’isoloir [ Par qui ? Les experts auraient-ils été présents dans chaque isoloir de ces cantons tout au long de la journée ? ]. L’expérience n’est pas concluante dans la mesure où la conception et la forme des tickets n’a pas permis d’effectuer le comptage manuel conformément aux prescriptions légales. »
Et les experts de conclure : « Le collège est d’avis que les résultats des opérations de dépouillement manuel des tickets ne peuvent être considérés comme fiables et que les résultats de la totalisation automatisée peuvent être considérés comme les plus fiables. » Affirmation (sans aucun argument à l’appui pour ce qui concerne la fiabilité de la totalisation automatique) dont la conclusion logique aurait dû être que la loi n’ayant pu être appliquée, il fallait revoter dans le canton concerné. Ce qui, en toute illégalité, n’a pas été fait, malgré une requête en ce sens déposée par le député Geert Bourgeois [4].
Ceci dit, en admettant qu’il soit susceptible d’amélioration, ce système ne pourrait rencontrer l’exigence démocratique d’un contrôle par les citoyens ordinaires que s’il était généralisé, autrement dit si un décompte manuel des « tickets » par des citoyens-assesseurs était organisé dans l’ensemble des cantons du pays. On voterait électroniquement mais seuls les résultats « papiers » seraient considérés comme valables. Alors pourquoi voter encore électroniquement ? A qui profiterait cet énorme investissement financier ?
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Voir aussi
- le Complément au rapport du collège d’experts chargé du contrôle du vote automatisé, concernant l’expérience " ticketing " à Waarschoot et Verlaine daté du 4 juin 2003 : Rapport concernant les élections du 18 mai 2003
- la question parlementaire suivante Demande d’explications de M. Philippe Mahoux au vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur
[1] Dans une note datée du 11 juillet 2002, le ministre de l’Intérieur informait le ministre du Budget que l’introduction du système de « ticketing » dans deux cantons électoraux engendrerait des frais supplémentaires d’un montant de 450.725 euros.
[2] Cf. Collège d’experts chargés du contrôle des systèmes de vote et de dépouillement automatisés, Rapport concernant les élections du 18 mai 2003, p. 20.
[3] Cf. Sénat de Belgique, Séance plénière du 5 juin 2003- Annales, p. 7.
[4] Cf. ibidem, pp. 7-8 et Chambre des Représentants de Belgique, Compte rendu analytique. Séance plénière du jeudi 5 juin 2003, p. 19.