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31/03/2019: L’incident de Saint-Josse : une preuve de plus que, même avec "tickets", le vote électronique pose problème


Après les élections communales du 14/10/2018, le collège des experts a détecté une anomalie importante, qui, rectifiée, a modifié le résultat de l’élection : dans un bureau, seuls 58 votes avaient été comptabilisés alors que 885 tickets avaient été scannés.

Lors du bug des élections de 2014, celui où 2250 votes ont été perdus, il n’y avait aucune trace de la volonté des électeurs, il n’y avait rien à recompter, et l’on a décidé d’ignorer ces votes "mal enregistrés" par les ordinateurs de vote.

Donc à première vue, c’est une bonne nouvelle pour le vote électronique avec “preuve” papier, puisque celui-ci permet un recomptage…

On peut aussi penser qu’il est formidable d’avoir un collège des experts et que grâce à leur vigilance on pourra obtenir le bon résultat de l’élection...

Mais en fait, il s’agit d’une preuve de plus qu’il y a toujours de sérieux problèmes avec le vote électronique, et ceci que ce soit avec l’ancien ou le nouveau système.

Voici quelques questions qu’il faudrait se poser :

  • Comment peut-on ne pas détecter lors de la nuit des élections que des centaines de votes sont manquants ?
  • Pourquoi faut-il attendre l’intervention du collège des experts pour se rendre compte d’un problème ?
  • Le président du bureau principal a-t-il signé un PV de l’élection complètement faux ?
  • Qui a effectué ce “recomptage”, des simples citoyens ? Des experts ? Des fonctionnaires ?
  • Pour un problème détecté, combien d’autres problèmes ont pu avoir lieu sans avoir été détectés ou médiatisés ?

En vote papier, une des vérifications de base est de comparer le nombre de bulletins dans l’urne avec le nombre de votants. C’est l’un des premiers mécanismes pour détecter une erreur ou une fraude. Si une urne arrive avec 58 votes au lieu de 885 ou si à la fin du dépouillement de toute la commune il manque 827 votes, on arrête tout et on ne publie pas de résultats tant que l’on n’a pas découvert l’origine du problème.

Le vote électronique a la particularité de pouvoir fournir un résultat même en l’absence de tout contrôle. En l’occurence, le contrôle citoyen est inexistant et celui des autorités semble inefficace.

Tant que le résultat n’est pas mathématiquement impossible ou suffisamment surprenant, il se trouvera toujours des politologues et des journalistes pour l’expliquer, et pire des candidats élus pour valider leur propre élection, comme c’est encore le cas en Belgique pour certaines élections.

Qu’est-ce qui a bien pu se passer dans le bureau principal de la commune pour ne pas faire un minimum de vérification ? Le rôle du bureau principal n’est pas uniquement d’insérer des clefs USB dans un ordinateur et de signer le PV produit par la machine.

Mais le système informatique déresponsabilise les acteurs de l’élection. S’il y a un problème, c’est l’informatique qui a buggé et on trouvera bien un fournisseur ou un auditeur sur qui faire peser la faute. Et s’il n’y a pas de problème apparent, le résultat fourni par le système informatique est forcément le bon.

Ce problème montre que le dépouillement manuel d’une et une seule urne par commune n’est pas suffisant pour détecter un problème, même pour une commune aussi peu peuplée que Saint-Josse-ten-Noode. Le rapport du Collège des experts donne l’explication suivante au "bug" de Saint Josse : c’est le retrait prématuré d’une des deux clés USB pendant la génération du résultat destiné au système "Martine" de totalisation. La clé a été retirée puis remise. Cette manipulation a réinitialisé les compteurs de résultats.

Si le logiciel de totalisation a pu produire un résultat dans lequel plus de 800 votes étaient manquants, c’est à nouveau un bug du vote électronique. Si le bureau principal de la commune a pu laisser sortir un tel résultat sans avoir vérifié et détecté cette erreur informatique, c’est qu’il y a un sérieux problème dans les procédures ou une confiance aveugle dans l’informatique.

Ce problème a été détecté car, dans ce cas, le collège des experts s’est fait livrer les clefs USB et a procédé à sa propre totalisation. Mais le collège des experts n’est pas obligé d’effectuer ce genre de vérification et ce n’est que récemment, suite à d’autres incidents, que le collège a insisté pour pouvoir effectuer cette vérification.

Ce faisant, les experts ont aussi un accès au détail des votes de chacun des bureaux, ce qui n’est pas sans poser des questions pour le secret du vote, car de nombreux politiciens et politologues rêvent de ce niveau de détail, alors qu’en vote papier la loi impose de mélanger trois urnes venant de quartiers différents.

La “preuve” papier a permis de “récupérer” l’affaire, et comme en 2014, on a pu compter sur le collège des experts pour faire toute la clarté sur ce nouvel incident, mais il est à espérer que l’on tirera les bonnes conclusions pour éviter que cela ne se reproduise.